Céréale
Pique-Cerise
Je
fis mon entrée dans la vie de manière fracassante : à mon
accouchement, mon père, qui était fin observateur, eut tôt fait de
remarquer que, par la mèche caramel que j’arborais sur le front,
je ne ressemblais ni à ma mère ni à lui, qui avait la tête noire
comme l’ébène. En proie aux pires soupçons, il accusa ma mère
de l’avoir cocufié avec notre voisin. Celle-ci, riant aux larmes,
dit à mon père qu’il était temps, rendu au cinquième enfant,
qu’il l’ait enfin remarqué. Elle le félicita de sa perspicacité
et mon père, tellement démonté par la décontraction de ma mère,
partit à rire lui aussi. Alors, dans la salle d’accouchement, ce
fut la rigolade générale : l’obstétricien en blaguant s’enquit
du nom qu’on donnerait à cet enfant, né des pérégrinations de
ma mère chez le voisin. Mon père suggéra de l’appeler Jésus,
car ma mère portait le prénom de Marie et que le Saint-Esprit avait
fait son travail. Le curé de l’hôpital, qui ne manquait pas
d’humour non plus, proposa d'offrir comme présent pour le
nouveau-né une belle grande croix en bois avec un paquet de clous
pouvant servir, on ne sait jamais, plus tard.
Mes
parents se mirent d'accord pour m'appeler Céréale Pique-Cerise, une
allusion à notre voisin Charles Pique-Cerise, mon vrai géniteur,
qui ne fit pas objection, car ses enfants légitimes portaient tous
les cheveux noirs de mon père. Il fut même présent à mon baptême,
car il avait participé à l'événement, d'une certaine façon,
disait ma mère en souriant, et il méritait cet honneur. C'était la
belle époque où les voisins troquaient leurs couilles pour grossir
les familles pendant que le curé de la paroisse veillait personnellement
sur les petits gars.
Dès
l’âge de cinq ans, on me confia aux bonnes sœurs pour m’apprendre
à lire. Celles-ci, voulant sauver leur âme en péril pour s’être
trop fait caresser les fesses par leurs confesseurs, me remplirent le
cerveau d’idées généreuses : elles me firent croire que
l’univers se divisait en deux hémisphères : le premier,
réservé aux pourceaux : les curés, les évêques, les
cardinaux ; le second, aux gens normaux : les financiers, les
violeurs, les voleurs, ceux qui sacrent, qui maudissent les curés et
qui jappent contre Dieu. Ces dernières personnes vivent de manière
insouciante, car ils sont sûrs que Dieu est sourd comme un pot. Moi,
ma grande crainte, c'est que le vieux Christ ne soit moins sourd
qu'on pense, et dans ce cas, suivant l'expression de mon père, « on
est dans la merde».
Par
prudence et par crainte de Dieu, je fis ma première confession à
l'âge de sept ans. Le prêtre, qui me reçut en se frottant les
cuisses et en bavant d’excitation, me demanda si j’avais entendu
parler de l'histoire du bâton de golf et de ses deux petites balles
bénites. Je ne connaissais pas ce miracle, tiré sans doute d'une
nouvelle version de l'Histoire sainte, et devant mon étonnement, le
curé mit sur un tourne-disque de la musique de Joe Dassin qui
chantait « Le moustique », et il se mit à fredonner en duo avec
lui : « Ne me pique pas, ne me pique pas ! » Il ajouta à mon
intention : « Attrape-moi, petit vicieux, attrape-moi ! le premier
d'entre nous qui trouve deux petites balles de golf a droit de les
manger ! » Ma formation de catholique était encore trop fraîche
pour savoir où il voulait en venir ; lui, par contre, le savait très
bien… de sorte qu'il les trouva et les mangea ! Et comme dessert,
il suça mon bâtonnet lui-même qui glissait comme la
Truite de Schubert, et il dit,
en bavant et en s'épongeant le front : « Dépêchons-nous, mon
petit ! L’église va bientôt se remplir de punaises de sacristie
et je dois donner mon spectacle quotidien. »
La
Symphonie de Schubert était encore inachevée quand, de retour à la
maison, je racontai cet incident à ma mère qui rigola : « En
somme, tu as fait la connaissance d'un curé tout à fait normal ! Le
bâton de golf, c'est le bâton de vieillesse des prêtres ; ils le
recherchent partout, et à cause de cette obsession, ils ont tous un
petit penchant pour la
Truite de
Schubert. Tôt ou tard, au cours de leur ministère, cette musique
résonne dans leur cœur sans sève et gare les petits garçons !
»« Mais, maman, dis-je en pleurant, le curé m'a refusé
l’absolution. » « Foutaise ! » « Et si je
vais dans le premier hémisphère, celui qui est réservé aux porcs
et aux cardinaux ? insistai-je. » « Et bien ! tu y retrouveras ton
père, ta mère, toute ta parenté, et en plus, je te le jure, tous
les joueurs de golf. »
Vers
l’âge de neuf ou dix ans, ma voisine Armande organisait une
surprise-partie en l’absence de ses riches parents. Son père avait
pris l’avion pour le Brésil et sa mère pour l’Italie : ces deux
pigeons s'aimaient d'amour tendre ! aurait dit La Fontaine. Je
m’attendais de recevoir un carton d'invitation d’Armande, qui ne
vint jamais, probablement parce que, avec ma délicatesse habituelle,
je l’avais entartée la semaine précédente. J'étais déçu
qu’elle ne reconnaisse pas mon talent de pâtissier (les filles
sont jalouses du talent culinaire des gars), car j’avais hâte de
pouvoir faire ces choses avec les filles dont les adolescents aiment
tant se vanter. Mon ami Robert, de deux ans mon aîné, m’avait
appris que lorsqu’on réussit à poser ses mains sur les cuisses
des filles (atterrissage délicat à cet âge, mais qui plus tard
s'effectue sans turbulence!) et qu’on les embrasse en même temps,
elles tombent enceintes immédiatement. Moi, je n'avais jamais
entendu parler de cette méthode ultra rapide pour faire des enfants
et, sans vouloir contester son immense savoir, j’émis un doute sur
le résultat, car j’avais surpris ma sœur précisément dans cette
situation et elle n’avait pas eu d’enfant. « On sait bien,
dit-il, avec de la bave sur la bouche, ta sœur est une femme frigide
! » Comme il venait d’insulter toute ma famille, je lui dis :
« Si tu répètes que ma sœur est frigide, je te casse les
deux dents qui te restent. » Pris de panique, il me dit :
« J'ai été mal cité par les journalistes ! Ta sœur n’est
pas frigide. C’est plutôt une salope ! » Dans ce cas, lui dis-je,
tu conserveras tes deux dents ! » Il s'empressa de changer le
fil de rasoir de la conversation et enchaîna sur le sujet de la
petite fête de ma voisine, en se plaignant de ne pas avoir reçu
d'invitation, lui non plus.
J’attendis
trois jours et Armande ne me donna aucun signe de vie. Le quatrième
jour, dans la ruelle, rencontrant Fernande, sa grande amie, je lui
demandai si je pouvais l’embrasser. La petite fille, surprise et
ravie, ne demandait pas mieux. Elle me tendit sa joue. Je
m’approchais de son nez quand une giclée de morve non réclamée
aboutit sur mes lèvres ; c'était vraiment dégueulasse (qu'est-ce
qu'on ne ferait pas à cet âge ingrat pour faire plaisir à une
femme!). Pour me venger, je m’empressai de lui caresser les cuisses
avec l'intention de la mettre enceinte. Les jours suivants, je
regardais son ventre qui, à ma grande déception, faisait la planche
parmi les dunes. C’est à partir de ce jour que j’ai entretenu
certains doutes sur cette théorie pour engrosser les femmes. Par
contre, je sais qu'elle est encore très populaire à Rome auprès
des cardinaux qui filent, pendant que les jeunes filles défilent et
que les prêtres pédophilent !
À
quinze ans, pour faire suer mes oncles, des célibataires sentant le
moisi, qui avaient recherché toute leur vie la cocotte parfaite,
sans jamais parvenir à la faire sauter, et pour épater mes copains,
je voulus avoir ma propre petite amie. Timide et maladroit, je
recherchais la compagnie d'une fille laide, pour ne pas courir le
risque de me la faire chiper ! Dans mon entourage, une sorcière de
ce type terrifiait la cohorte masculine
et même les vieux, habituellement
si vicieux, n'osaient jeter sur elle le moindre regard concupiscent
! Ce canon de laideur répondait
au prénom parfumé de Coco. Son nez était plus croche que les
déclarations d’impôts d'un comptable italien de Montréal. Avec
un empressement qui me parut louche, elle accepta de sortir avec moi.
Les membres de sa famille me convièrent à un repas familial pour me
montrer leur reconnaissance. La mère, folle de joie, et folle tout
court, justifiait l'allure hideuse de sa fille, par une punition du
ciel, pour la décongélation subite et mystérieuse de la sainte
bite du pape Jean Paul dans une crypte de Rome. On m'assigna une
place à côté de cette matriarche, une castratrice de première,
qui présidait l'assemblée avec sa voix nasillarde, pendant que son
petit mari, un vrai nain vilain et hideux, souillait sa culotte de
rétention comme tous les nains vilains et hideux ! Héros de la
soirée, je revivais l'ivresse des exploits des sportifs québécois
qui décrochent l'or aux olympiques pendant que les athlètes
anglophones enregistrent des résultats poches. Comme les champions
québécois, je redoutais de devenir un instrument de sale propagande
fédérale avec, pour insulte finale, une nomination comme membre du
L'Ordre du Canada. Les moumounes fédéralistes du Québec me puent
au nez, pourquoi le cacher ? Bref, je n'aurais jamais du accepter
cette invitation, car j'avais oublié que la proximité d'un objet
grossit sa forme, et Coco, vue de proche, était encore plus
rebutante que je ne l’avais imaginé. Aussi, après cette pénible
réception, je sondai désespérément dans les livres de bienséance
une façon polie de me séparer de cet objet encombrant.
En
attendant que le couperet tombe sur cet amour naissant, nous sommes
allés au cinéma voir un film d’horreur. On était, comme on dit,
« en famille » ; Coco ressemblait tellement à l’actrice
du film qu’à la fin de la représentation, j’ai failli lui
demander son autographe. Je l’invitai ensuite au restaurant où la
voyant humer comme une candidate au Bocuse d'or les fumets en
provenance de la cuisine, je pris mes précautions pour éviter la
note catastrophique en disant avec autorité au serveur : «
Pour nous, ce sera uniquement deux cafés ! » Coco ravala son
souffle. Elle craignait plus que la peste un futur marié fauché ;
elle soupçonnait que je ferais un écrivain, et dans ses cours de
préparation à la bombe M (pour mariage), on l'avait mise en garde
contre ce genre de bons à rien qui écrivent des livres sarcastiques
et se font vivre par les femmes !
La
partie la plus délicate restait à jouer : suivant les us et
coutumes, en la quittant, je devais démontrer une certaine forme
d'empathie en l'embrassant chastement, par exemple, sur la joue.
Problème pratique : comment faire pour éviter la coulée de
larve en provenance de son nez torve ? Mes copains, très inventifs,
m’avaient conseillé dans un tel cas de fuir à toute vitesse la
zone sinistrée sous peine d'être englouti par l'avalanche. Avec la
prudence et la circonspection d'un sherpa, je m'approche de sa joue,
je ferme les yeux et, pour récompense, j'avale encore une autre
maudite giclée de sa larve nasale. J’étais choqué, car la coulée
était trop fraîche à mon goût et j'ignorais si le pourcentage
d'impureté du liquide, qu'elle m'avait fait goûter, entrait en
violation avec la Convention universelle des matières putrescibles !
Sa conduite a réveillé ma méchanceté : je lui ai dit que je
lui donnerais de mes nouvelles par la poste. Or, la poste était en
grève depuis des mois ! Coco fit alors une crise de nerfs : «
Salaud ! Tu me laisses tomber ! Pour toi, j'ai appris tous les trucs
cochons de la psychanalyse, enseignés par Freud ! Comme tous les
hommes, tu es une brute ! » Cette critique brûlant mon orgueil et
attaquant ma masculinité, je répondis : « Et moi, j'ai lu
tout Jung, j'ai appris tous ses trucs les plus gentils et jamais je
n'ai eu affaire à pareille... » Pour toute réplique, elle versa
des larmes.
J’allai
raconter cette pénible histoire à ma mère qui partit encore à
rire (elle est vraiment rigolote, ma mère!) : « C'est,
dit-elle, un pur conflit littéraire entre Freud et Jung que tu
régleras plus tard en chiant sur les théories de ces deux merdeux.
Pour le moment, je vais te donner un truc que j'ai appris dans la
Nouvelle Revue de Théologie
française : si la fille te
répugne, concentre-toi sur son cul et bénis le ciel de l'avoir mise
sur ton chemin parce que tu vas pouvoir faire avec elle des choses
intéressantes, plutôt intéressantes et très intéressantes !
L’Église enseigne aussi ce principe dans Les
douze étapes en douceur de la vie du prêtre catholique et
alcoolique, un recueil qu’un
prêtre vertueux m’avait prêté lors d’une retraite fermée
(enfin pas tout à fait fermée!). »
Deux
mois plus tard, c’était pourtant contre mes principes, profitant
de son voyage à l’étranger et de l’adage bien connu : «
loin des yeux, tu m'écœures », je lui envoyai une belle carte
postale avec église, croix et cimetière, accompagnée du roman Pour
qui sonne le glas d’Ernest
Hemingway ? Comme elle avait l'ouïe fine, elle ne donna aucun signe
de vie.
Trois
mois plus tard, la chance me collait au cul, je tombe amoureux fou
d’une théologienne qui enseignait la science divinatoire du
catholicisme à l’Université de Montréal. Elle avait la bouche
d’une actrice trois X, et des jambes avec plus de X encore, de
sorte que j’arrivais toujours à la maison avec des érections
mystiques nécessitant secouage immédiat du poignet. Chaque
dimanche, avant la messe de dix heures, je devais, pour être pur à
la communion, me faire épiler les péchés par le curé, car
j’officiais comme lecteur. Comme le curé arrivait souvent en
retard (il fallait bien qu’il s’occupe de ses poules!), je
sautais la barrière de la communion, sacrilège qui n’échappait
pas aux aigles de la première rangée qui scrutaient le bas de mon
surplis en fantasmant sur mes allées et venues de la veille. Le bon
curé, qui n'arrivait pas à faire taire ces langues sales
catholiques, n'eut d'autre choix que de m'éjecter de ce panier de
crabes.
Revenons
à ma théologienne. Ma belle Samaritaine était rongée par le ver
de la religion. C'était en plus une débandante affective (les
femmes, en général, sont des femmes digitales, puisque, depuis la
venue de l'informatique, elles se caressent aussi bien la chatte que
la souris !) ; elle ne
faisait rien sans l'avis de son confesseur qui précisément lui
disait de ne faire rien. Aussi, je passais mon temps à lire du
Claudel et des Prions avec
l'Église; ce qui n'est pas
terrible pour la libido. Cela n'avait aucun bon sens ; elle avait des
jambes à faire gicler la queue du pape par-dessus la Place
Saint-Pierre, en formant un bel arc-en-ciel tout blanc dans le ciel
de Rome ! Or, à cause de cette sangsue en soutane, jamais elle ne
permettait l'approche de sa zone payante. Je ne pouvais accepter que
ce merdeux à robe noire entrave mes élans sexuels. Je pris mon
courage à deux mains et j’annonçai à ma théologienne que
j'allais chercher des cigarettes au restaurant du coin. Comme je ne
fumais pas, la belle pédagogue dans un éclair d’intelligence
céleste, au lieu de me remercier, fondit en larmes. Je pleurai avec
elle les larmes les plus sincères de ma vie. Elle crut que je me
repentais sincèrement de mon mensonge, que j’étais le nouvel
enfant prodigue et que je reviendrais sur ma décision. Mais, pour
son grand désespoir et pour mon plus grand plaisir, c’étaient des
vraies larmes de joie que je pleurais. Le temps de ma libération
théologique avait enfin sonné…
Fébrile
comme tout évêque qui borde pour la nuit son enfant de chœur le
plus mignon, je repris courageusement mon statut de célibataire, au
grand bonheur de mon ami Daniel qui venait d’éjecter de sa vie
Rita, la princesse capricieuse, qui refusait de répéter avec lui la
meilleure séquence du film porno qu’ils venaient de voir.
Daniel,
qui partageait désormais sa solitude en compagnie des papiers
Kleenex, avait besoin d’un compagnon pour calmer ses bandaisons.
S'imaginant trouver en moi le fameux Grec qu'il avait vu dans le
film, il me proposa une variante des cochonneries helléniques qui
l’avaient tant ému. Il était en pâmoison devant la philosophie
grecque et ses variations anales et malades que lui avaient
enseignées, avec des exercices pratiques, ses professeurs agrégés,
membres honoraires du Conseil
des Arts du Canada. Fort
heureusement, ces saloperies n’avaient aucune emprise sur moi. Pour
dire vrai, elles me dégoûtaient. Je décidai de mettre la pédale
douce sur ce genre de musique et lui préférai la compagnie d’André,
un as du bicycle, mais pas pédale pour deux sous ! Il excellait dans
tous les sports extrêmes : tout l’intéressait à la
condition de revenir à la maison avec un bras cassé, une cheville
amochée ou un genou déboîté. Ce maniaque s'amusait à faire
chavirer le canot dans lequel nous nous trouvions, question de
pratiquer ses techniques de survie. Comme j’avalais une pinte d’eau
chaque fois que nous pratiquions ces jeux de barbotage, je lui
conseillai à l'avenir de se faire accompagner par un canard. « Je
n’en connais aucun », dit-il. « Ah! Non! Et, ta sœur, tu la
connais ! » lui ai-je demandé. Notre belle amitié prit l'eau.
Pour
chasser l'ennui, j'entrepris ma maîtrise en lettres à McGill
university.
On m'assigna comme tutrice une belle Birmane animale, brillante comme
un plancher ciré, et assez reluisante en français. Elle me reçut
dans un loft qui lui servait de bureau, et avant d'enlever son slip,
en guise d’examen d’admission, elle m'avertit qu'un Tigre du
Bengale, avec ses crocs acérés, allait bondir de son buisson
vaginal. Je pris peur, car ma carte de dompteur de tigres était
expirée depuis ma théologienne, mais la Birmane m'informa que je
passais l'épreuve d'admission en français de McGill
university.
Quand elle m'a demandé quel était le sens des deux points dans la
théorie de la ponctuation et que je lui palpai les seins, elle me
regarda avec un point d'interrogation, puis elle émit un point
d'exclamation en voyant mon impressionnante virgule. Craignant de se
faire prendre entre parenthèses, elle mit un point final à mon
ardeur, en concédant que j'étais plus doué en français que la
moyenne. Et après trois points de suspension..., elle accepta de
diriger ma thèse.
Je
pensais naïvement qu'on plongerait dans l'étude des grands auteurs
comme Hugo, Balzac, Voltaire, Rousseau, mais elle me proposa à la
place d'écrire une thèse sur la sémillante Canadienne Gabrielle
Roy. Je n'ai rien contre elle, c'est sans doute une bonne personne,
propre, élevée par les bonnes sœurs, canadienne, et tout et tout,
mais quand je pense qu'on a le privilège d'avoir dans notre vrai
pays, le Québec, deux écrivains québécois de très forte voilure,
Anne Hébert et Gaston Miron, je ne vois pas pourquoi, au lieu de
sillonner la mer, on se contenterait de patauger dans la marre des
canards ! Je voulais respirer l’air frais du large, pas celui des
cales sèches ! Perplexe, je m’interrogeais sur l’utilité de ce
département de français de McGill
university
quand d’excellents professeurs enseignent déjà cette matière
dans les universités francophones de Montréal. Il est vrai que
leurs conseils d'administration ne font pas une pause religieuse le
samedi, et qu'ils ont beaucoup moins de sous que leurs rivaux
ethniques. Les administrateurs anglophones, avec plus d'argent,
sucent quand même le gouvernement pour avoir des subventions et
travaillent à l'assimilation des Québécois sur leur propre
territoire. Pour moi, c'est une énigme...
McGill
university
est Canadienne avant tout. On aura beau lui tordre le cul, la mettre
sous torture, jamais elle ne sera québécoise. Traditionnellement,
elle vise l’épanouissement de la communauté anglaise et,
forcément, cela s'opère au détriment de la communauté
francophone. La vraie question à se poser est la suivante :
pourquoi les Québécois acceptent-ils béatement de faire saper leur
rêve de pays et de se faire mettre les bois dans les roues sur le
plan économique par les Anglos en provenance de McGill
university ?
Je
compris alors que je devais longer les murs en silence. Et quand je
remis un mémoire de maîtrise rose vif, portant sur l'épanouissement
des auteurs canadiens-français au Canada, je fus reçu avec des cris
de joie par le milieu universitaire anglophone. On soumit dès lors
ma candidature pour obtenir l'Ordre
du Canada.
Je reçus solennellement et pompeusement mon diplôme lors d’une
belle soirée académique sous le riche patronage du parti libéral.
Ce
diplôme en poche, frappé du sceau de la manufacture anglaise, je
pris l'avion avec l'objectif ambitieux et prétentieux de conquérir
la France littéraire ! J’avais beaucoup fréquenté les auteurs
classiques en dehors de mes cours à McGill ; c'était la seule façon
de les connaître et les apprécier (!), et j’estimais pouvoir
facilement rivaliser avec leurs avortons sur leur propre terrain.
Plus pauvre que Job, qui avait tout de même son tas de fumier,
j'avais, au préalable, pris rendez-vous avec un important gérant de
banque italien de Montréal pour avoir suffisamment de sous pour
m'offrir le fumier du jour des restaurants de Paris. Je montrai à
mon gérant mon diplôme obtenu de McGill
university et j'osai lui
demander de l'argent. Il partit à rire (il trahissait son statut
d'ancien de cette institution), mais pour me consoler, il consentit à
me prêter trois mille dollars, si j’en remboursais le double, soit
six mille dollars, le mois suivant, sans quoi il chargerait son
vice-président (un confrère), de me casser les jambes (ça faisait
partie de sa description de tâches). Je lui fis humblement remarquer
que ses méthodes s'apparentaient à celles de la mafia. « Vous êtes
fin observateur, mon gars, mais c'est ainsi que ça se passe dans les
banques à Montréal. Naguère, confessa-t-il en imitant la voix de
Marlo Brando dans le film « Le
Parrain », les emprunteurs
riaient de nous, les
Italiens,
en disant que nous ressemblions à de grosses pointes de pizza
flottant dans du fromage Parmesan et qu'ils nous rembourseraient
quand bon leur semblerait. C'était humiliant, ça nous donnait des
gaz et nous causait des migraines pour lesquelles on devait consulter
des psychiatres. Désormais, si un emprunteur ne paye pas ce qu'il
doit, sa vie comme son prêt arrivent à terme ; on reçoit le
paiement à l'enterrement sans que les policiers ne nous fassent
d’histoire. Jamais d’enquête ! Et ça fonctionne bien. »
À
la fin du mois, j’avais oublié ce petit détail qu’on appelle un
remboursement. Le gérant italien m’appela à Paris pour me
confesser que mon dossier l'obligeait à essorer ses culottes et que
la seule manière d'arrêter le déluge, selon son médecin, c'était
de lui envoyer un paquet d’argent liquide de six mille dollars,
sinon son vice-président, qui était en nage lui aussi, trouverait
bien une solution à ce problème. En somme, je lui causais une telle
fatigue qu’il se faisait du souci pour la suite de ma vie. Il me
suggéra d'aller flâner dans le cimetière le plus proche, de me
branler, peut-être pour la dernière fois, en parcourant la
nécrologie des journaux et de lire les dernières pages de Bonheur
d'occasion de Gabrielle Roy.
J'étais irrité non par les conseils qu'il me réservait (c'étaient
ceux d'un bon père de famille), mais plutôt par sa suggestion de
lecture, car je trouvais qu'il y avait mieux. De plus, je soupçonnais
qu'il sentait le porc et qu'il avait négligé de respecter le
sabbat. Le drôle admit qu'il avec un porc comme esclave sexuel, et
qu'il n'allait pas à l'office, car le Talmud n'était pas assez
cochon pour lui. En outre, il trouvait insupportable que je mette en
doute ses talents de critique littéraire. Mettant un terme à ses
confidences, il m’assura qu’il veillerait personnellement sur mon
avenir qu'il estimait particulièrement court. Je lui répondis que
s’énerver ainsi le ferait pisser davantage et l'empêcherait de
lire la belle prose de l'écrivaine Gabrielle Roy. Je lui envoyai
mille baisers de France en l’invitant à humer la culotte de
rétention de son chien homosexuel. Au bout du téléphone :
silence lourd ! Bientôt suivi du commentaire suivant : « C'est
vrai que mon chien dégage une certaine odeur, mais il n'est pas
homosexuel pour autant ! Pour cette insulte à toute la communauté
italienne, tu vas devoir me rembourser douze mille dollars. » Il
raccrocha.
La
queue orpheline, je rodai autour des cinémas pornos à la recherche
non pas du temps perdu, mais d’une demoiselle dont l’honneur
perdu me rapporterait quelques sous au lieu de m’en coûter, car je
voulais rembourser mon gérant mafieux.
Le
genre de poule que je recherchais se retrouve généralement dans les
nefs des églises ou dans les fourrières féministes. Le ciel
complice veillait sur moi ! En me rendant au Bois de Boulogne,
cathédrale des sens, j'aperçus une vraie Sainte Vierge qui, les
jambes écartées et sans petite culotte, récitait (quelle idée, ma
foi), son chapelet. Cette catholique d’allure mondaine (vous allez
me dire que les mondaines ne ressemblent pas toujours à des putes,
et je vous répondrai que, bien au contraire, les mondaines ne sont
bien souvent que des mondaines!), ne désirait pas tant arrondir ses
fins de mois que de se faire effeuiller le missel en faisant froisser
les pages de ses jupons (c'est le désir secret de toutes les femmes
catholiques et les pépères de l'Église le concèdent entre les
lignes). Me sentant pépère, moi aussi, je ne pouvais bouder ce
plaisir. Je m'offris cette proie au milieu des buissons et, pour
m’être encanaillé, je récoltai, dès le lendemain, des
champignons variés, et surtout très avariés, qu’elle tenait de
son curé, de Pierre, Jean, Jacques, et de beaucoup d’autres maris,
tous fidèles à leur femme.
Pour
justifier son métier de prostituée, elle disait : « À
seize ans, lors d'un cours privé de chant grégorien, un cistercien
des plus savants, m’a assiégé le petit Jésus
sous
prétexte que le démon squattait dans cette région. Fin
connaisseur, il me proposa de le chasser immédiatement en le
pulvérisant avec des gouttes blanches en provenance de son
compte-goutte ecclésiastique, faisant l'objet d'un brevet du
Vatican. Je trouvai son plan merveilleux et, en bonne épicurienne,
je consentis à perdre ma virginité. Cependant, mes parents, qui
sont d'une autre époque, quand ils virent mon ventre se gonfler
comme une voile, me prièrent (en bons catholiques!) de faire mes
voiles. Comme un ballon qu'on crève, je fus expulsée de la maison
familiale. »
Appréciant
sa sincérité, j’adoptai Vierge Marie. Et dès que je fus
complètement guéri des champignons qu’elle m’avait donnés en
guise de bienvenue, cette divine orpheline, plus chaude qu’une pute
de cinéma, généreuse et capable de tout, rajouta à ses bienfaits,
après être encore allée jouer au Bois, une autre chaude-pisse qui
requerra toute la science, l'imagination et la patience d’un
médecin pisse-froid, grand spécialiste des maladies vénériennes.
Vierge Marie, magnanime, offrit de payer le prix très élevé de la
patience du médecin. Cependant, le lien de confiance entre nous
s’était brisé (comme disent les employeurs en congédiant leurs
esclaves) et je la répudiai.
En
proie au syndrome de la queue solitaire et délaissée, je me
rabattis sur une étudiante encore mineure, qui revenant de l’Île
Maurice, fit la moue devant mes performances pourtant honorables
qu’elle compara aux prouesses incroyables de son fameux
Bouhamoumou, un macaque de cent kilos, qui avait passé toutes ses
nuits dans la jungle à lui donner des « extra » et des « encore
». Comme j’étais doué pour les « extra », mais pas encore pour
les « encore », après trois heures de frottage de peau, ressentant
une légère fatigue, j’estimai que les préliminaires étaient
terminés et que c’était le moment de rassembler mes dernières
forces pour expulser mon jus. Tel un pompier, je l'arrosai avec toute
ma fougue. Ma belle, très déçue de la fin du programme et forte en
répartie, me traita « d’éjaculateur précoce » ! Cette remarque
me blessa (dans mon humble personne, elle s'attaquait au roc de
l'invincible virilité de l’homme et j'avais tout de même
travaillé pendant trois bonnes heures sans être payé). En signe de
protestation, je quittai immédiatement le plumard en remontant le
menton à la manière de Mussolini (j’avais vu cela aux actualités
et ça m’avait impressionné). La jeune femelle, repentante et
magnanime, se dit prête à reconsidérer mon cas et à m'accorder
une autre chance, à la condition expresse que je relève le défi du
suppositoire ; il s'agissait d'aller la baiser chez elle, sans faire
de bruit, pendant que son père, un gendarme de métier, regarderait
la télévision. Par fierté (elle avait éreinté mon amour-propre),
j’acceptai de relever ce défi enrobé de danger (à cause du
suppositoire sans doute!). J'étais très sceptique quant au
résultat, car son gendarme de père avait l’ouïe fine des
dauphins et les programmes de télévision de la soirée
s’annonçaient ennuyants. Bref, la conjoncture était favorable à
ce qu'on me prenne les culottes baissées ! En sonnant à la porte,
je figeai en apercevant son bloc de glace de paternel, un
colosse, pesant plus de cent vingt kilos. Il me conduisit auprès de
sa fille, en me disant d’une voix doucereuse et crémeuse comme
celle d'une jeune fille timide, d'en pendre bien soin.
Personnellement, j'appréhendais son statut incertain de mineure et
j'avais des doutes sur le sens de l’humour du paternel. En faisant
des pointes de ballerine, j'entrai doucement dans sa chambre (l’heure
du suppositoire était arrivée!) et ma généreuse devint plus molle
qu’un cornet de crème glacée qui fond Sous
le soleil exactement (comme
dit la chanson). Ma belle aventureuse, souriante comme une abbesse
recevant de l'évêque, comme signe d'amitié, de nouveaux cierges
pascals, qui, détail non négligeable, sont plus gros que ceux de
Noël, m'accueillit en avouant qu'elle irait raconter à son père
que je l’avais violée, si je ne l'envoyais pas directement au
septième ciel comme une fusée en moins de cinq minutes. En somme,
elle privilégiait la performance quand je recherchais l'amour...
Devant cette méprise, redoutant une descente de flic, je sautai par
la fenêtre et m’engouffrai dans la ruelle arrière en vérifiant,
de temps en temps, si quelques volées de plombs ne m'avaient pas
troué les fesses...
Tout
en transe après cette course effrénée, j'entrai dans un bar et
j'avalai un cognac. À peine étais-je arrivé que le garçon
m'avertit qu'on voulait me parler au téléphone. Surpris, je prends
le combiné pour entendre la voix familière de mon gérant de banque
italien qui dit : « Mon bon ami (c'est ainsi que les Italiens
appellent familièrement ceux qui finissent avec un coup de couteau
dans le dos), tu me dois vingt-cinq mille dollars. » Je lui réponds
: « Voleur ! Je ne te dois pas cette somme. Veille sur la vertu de
ton chien qui sent la grosse mama italienne ! » « Jeune insolent !
tu vas me le payer ! articula-t-il très lentement ». Et il
raccrocha...
Ce
téléphone m'avait bouleversé. Je marchais pour évacuer cette
crotte italienne quand j’aperçus deux jeunes ados qui s’en
prenaient au sac d’une vieille dame. Cette dernière hurlait en
distribuant des coups de canne. Trouvant la cause étonnante et le
combat inégal, mon âme de sauveteur et ma frustration de baiseur
refoulé me firent voir rouge. Devant le feu de mon regard, les ados,
croyant avoir affaire à un fou, ne firent ni une ni deux et
déguerpirent. La vieille, plus troublée par cette attaque de voyous
que par sa dernière relation sexuelle avec son évêque, revenant de
Rome bandé comme un coq, me supplia de la reconduire chez elle. Elle
habitait le quartier des pleins de merde et de fric. Après avoir
vomi toute sa mésaventure à son fils chéri, qui payait au noir les
touchers de son assistant marocain et s'adonnait au troussage
domestique avec la cuisinière pakistanaise, la vieille exigea qu’on
me serve le cognac du sauveteur. Elle s’enquit ensuite de la raison
de mon séjour à Paris. Je confessai que j’étais demandeur
d’emploi. Faisant valoir mon diplôme de maîtrise en lettres de
McGill university (cela
la fit cligner des yeux), je lui confiai que je souhaitais travailler
dans le domaine de l’édition en qualité de nègre, car avec le
diplôme déconsidéré que je venais d’obtenir (elle approuva d'un
signe de tête), je ne pouvais rien espérer de mieux en France.
J'ajoutai que je connaissais l’œuvre de la Canadienne Gabrielle
Roy. « Celle qui écrit des livres de recettes, dit-elle, je la
connais, j'ai déjà mangé un de ses trucs au resto. Ce n'était pas
mauvais, pas très subtil, mais enfin... » Je n'osai la contredire,
sachant que les éditeurs québécois mettent tous leurs œufs dans
ce genre de panier. « De plus, ajoutai-je, comme deuxième handicap,
je porte un nom qui sonne sec dans les salons, car il n’a pas de
particule pour le gonfler comme un ballon ; cela me disqualifiait
auprès des maisons d'édition prestigieuses comme Gallimard ou
Grasset. Enfin, comble d'effronterie, je n’avais pas daigné verser
le pot-de-vin coutumier du petit nouveau à un académicien pour
qu’il me parraine, ni donné mes cent balles pour qu'il me
migraine. À ce jour, tous mes manuscrits ont été systématiquement
refusés, sans même avoir été lus, pratique édifiante tout à
l'honneur de l’édition française ! Émue par ma franchise, la
vieille me lance tout de go : « Mon petit, le diable vous
a allumé un lampion béni dans le cul, car mon fils chéri, mignon
comme tout, est candidat pour le prochain prix Nobel de littérature
(ma famille a les fonds nécessaires et les appuis politiques, n'en
doutez pas!). Il travaille comme directeur du journal ParisVache
et il va vous engager. Évidemment, à cause de votre manque
d'expérience, vous n'avez pas la plume pour caracoler en tête des
colonnes du journal Le Monde
Diplomatique mais, au moins,
vous allez pouvoir bosser tous les jours de la semaine et puisque
vous n’êtes pas juif de naissance et que vous ne pouvez pas
compter sur l'échelle de Jacob (honte à vous!), vous allez devoir
commencer au bas de l'échelle et non à l'échelle des bas comme
disent à la blague les jeunes loups rédacteurs.
Son
fils, Hubert de Vaurien (son nom sonnait moins sec que le mien)
grimaça, mais ne pouvant résister à l’autorité de sa mère, il
me convoqua pour le lendemain à la rédaction du journal ParisVache.
En tant qu’immigrant, il me reçut avec tout le respect et toute la
considération qu'on accorde à un Arabe qui nettoie les chiottes. Il
m'avoua qu’il aurait préféré que sa vieille meure étripée par
les jeunes voyous que j’avais chassés, qu’il était franchement
désolé que je l’aie sauvée, que la mort de cette pourriture (il
parlait de sa mère) l’aurait personnellement arrangé vu que sa
succession pissait le fric. Puisque la vioque vivait toujours, et
qu'il n’était pas un fils ingrat, il n'avait d'autre choix que de
faire les caprices de cette sautée. Bon perdant et bon prince, il me
confia l’immense responsabilité de rédiger la rubrique des chiens
écrasés du journal avec l’obligation d’enregistrer tous les
jappements et les frétillements de Frigide Fardeau, quand elle
s'adresse à ses pairs, les bêtes.
Pendant
six mois, pas un chien mis en charpie par une tondeuse, pas un chat
errant circulant librement dans Paris, ne fut négligé dans ma
chronique. Il se produisit alors un incident important : la
comtesse Mal Éduquée (qualité courante à Paris) en allant se
faire frisotter le poil du pubis chez son raseur de touffe par un bel
après-midi de novembre, dans l’arrondissement des précieux, avait
laissé sa chatte Anémone sans surveillance. La chatte fut kidnappée
par deux Chinois immondes qui menacèrent de la déporter à Pékin,
Place Tian'anmen, pour la faire miauler en toute liberté. C'était,
chers lecteurs, une attaque en règle contre ce régime démocratique
qui tient en place par la compassion de son armée et par l'ouverture
d’esprit et la souplesse de ses dirigeants. La grande Frigide
Fardeau, qui en savait un bout (était-ce le bon?) sur ces salauds
marinant dans la poutine chinoise, promit de se faire photographier
les seins nus pour payer la rançon exigée par les kidnappeurs de la
chatte. Malheureusement pour le félin, la photo des seins de Frigide
Fardeau fit rire tout le monde, y compris le curé de Montmartre, un
amateur de boules et vicieux de première, jurant que durant toutes
ses visites paroissiales, il n'avait jamais rien vu d’aussi moche.
Les voyous chinois se comportèrent comme des voyous chinois :
ils abandonnèrent l’idée d’obtenir une rançon et abattirent la
chatte en mimant des chinoiseries (quels vilains personnages). Pris
de remords après cet acte abject, ils se constituèrent prisonniers.
Ils furent soignés à l'institut psychiatrique de Paris, qu'on
appelle familièrement l’Académie.
Or, cette nouvelle importante, qui tenait les lecteurs des particules
élémentaires du journal ParisVache
en haleine, n’était que pure invention ; la chère comtesse Mal
Éduquée, elle portait dignement son nom, avait monté toute cette
affaire uniquement pour faire parler d’elle au journal de vingt
heures. Elle comptait, en effet, pouvoir se remarier avec un
culturiste nègre, homosexuel et aveugle pour pouvoir avaler en toute
légalité et en toute quiétude sa grosse bite (c’était son
fantasme de vieille). Ce Nègre, adepte de cannibalisme, la veille de
la cérémonie nuptiale, croyant manger un homme Blanc avec une
pincée de sel, avala à la place un rat noir avec une cuillerée de
poison. Cette erreur lui coûta la vie. Remuant ciel et terre pour
que cette nouvelle effroyable soit étalée dans tous les journaux,
et en particulier dans ParisVache,
la comtesse dut se rendre à l'évidence : cela n'intéressait
pas les journalistes qui préféraient écrire des éditoriaux
dithyrambiques sur la belle actrice Andrée, une prude comédienne
des films trois X, qui apparaissait à poil dans un film porno sur
Jeanne D’Arc. Devant l’indifférence des journalistes, la
comtesse voulut se venger en faisant voler sa chatte préférée par
les deux Chinois, résidant à deux pâtés chinois de son domicile,
tout en gardant sa chatte personnelle propre et intacte. Pour avoir
relayé cette fausse nouvelle, je fus licencié, dans le déshonneur,
malgré mon beau diplôme flamboyant de McGill
university.
Le
moral dans les talons, je faisais une promenade pour me requinquer le
québécois, quand un grand gaillard m'accosta : « Je suis le
vice-président de Banque Usuraire de Montréal avec laquelle vous
avez fait affaire et je viens vous réclamer les vingt-cinq mille
dollars que vous devez à notre distingué gérant. Si vous refusez
de me rembourser immédiatement, je me transformerai en Terminator
». « Pour cela, je dois passer à ma banque », dis-je dans un
éclair au chocolat d'intelligence, en me demandant ce que je devais
faire pour me débarrasser de ce pot de colle. « Je vous accompagne
», dit-il avec un sourire de satisfaction. J'entre alors dans une
institution bancaire, rue des pleins, et m'approchant d'un comptoir
de prêt, je crie à tue-tête, en désignant le vice-président
italien : « Au voleur ! Au voleur ! Cet homme est un voleur de
banque. » Aussitôt, une caissière actionne le signal d'alarme.
Pris de panique, l'Italien n'eut d'autre choix que de déguerpir.
Quand les gendarmes arrivèrent, je leur racontai qu'un sale individu
(membre de la nationalité usuraire) voulait m'extorquer. Les
gendarmes m'invitèrent à déposer une plainte contre X, et comme je
trouvais que les enquêteurs, en désignant X, avaient une vision
trop étroite des choses puisque je leur avais raconté toute
l'histoire de A à Z, je mis les bouts comme disent les Français.
Triste
et incompris, j'entrai dans un café où une petite brune,
mi-avocate, mi-salope (souvent elles font les planchers dans les bars
ou s'adonnent au pole dance
(comme la Reine d'Angleterre selon la rumeur) pour se faire des
clients!). Elle était si pimpante qu'elle attira mon attention. Elle
avait les jambes dignes de figurer parmi la liste des plus beaux
péchés (j'ai une fixation sur les jambes), et une poitrine de
poupée gonflable qui me gonfla. Suivant le rituel de l’écrivaine,
elle faisait semblant de noter dans un petit cahier noir, en bâillant
de temps en temps, quelques réflexions profondes sur son moi, sur
son sur-moi, sur son en-moi, sur son émoi et sur le mois en cours
(elle avait lu Freud, c'est certain), en fronçant les sourcils à la
manière d'Élisabeth Badinter, pour avoir l'air intellectuel.
M’approchant de ce petit bas-bleu (j'avais de l'éditeur dans le
nez), je me présentai en tant que chroniqueur du journal
ParisVache, mis en réserve du
grand journalisme pour six mois, en attendant d'écrire des sermons
pour la publication La Croix
vous aime et le Christ se fiche bien de vous !
À la manière George Clooney, je fis rayonner mon sourire avec mon
dentier blanchi à la chaux. L'effet fut foudroyant : l'avocate
mi-salope, mi-avocate, lança nerveusement : « C'est vous qui
écrivez toutes ces génialeries sur les chiens écrasés, en citant
du Léautaud ! » Prenant l'air princier de Laurence d'Arabie, je ne
répondis pas. En grand seigneur, je m'assis à sa table et j'allumai
négligemment une cigarette que j'enculai dans mon porte-cigarette, à
la manière de Philippe Sollers. Ma cigarette émit une fumée
blanche en signe de satisfaction (la même que celle qui indique
qu'un nouveau pape a été enculé par ses pairs pendant qu'il était
emmuré pour que personne ne puisse entendre ses cris de joie) ! La
petite raffolait de ma chronique qu'elle trouvait encore plus drôle
que les éditoriaux du journal Le
Monde qui sont tellement
coincés qu'ils font éclater de rire les lecteurs. Elle avait publié
un premier roman sur lequel les éditeurs avaient craché sous
prétexte qu'ils ne pouvaient obtenir de subvention (celles des
vautours ou des assistés sociaux éditeurs). En réalité,
l'écrivaine refusait tout simplement de se mettre à quatre pattes
et de s'écraser en remerciant, dès la première page, suivant
l'usage des éditeurs québécois, le Conseil
des Arts pour l'aide obtenue.
Cette pratique colonisatrice humiliante qu'on retrouve dans tous les
livres du Québec démontre l’à-plat-ventrisme des éditeurs
québécois. Elle force l'auteur à salir son livre avec de la sale
propagande pour la merde fédérale et le signale à tous comme une
carpette. Partout ailleurs, on ne dégoûte pas l'auteur et le
lecteur de cette façon : on présume qu'ils sont intelligents !
« Mon deuxième roman sera publié, poursuivit-t-elle, car malgré tous les obstacles précités, mon éditeur a une obsession pour mes jambes. » Comme j'avais la même fixation que lui, je lui demandai de pouvoir visiter son lieu de création, avec en tête une idée de récréation et peut-être même de procréation ! Dès qu’elle fut calée dans son fauteuil préféré, mimant le petit chien, je me suis mis à quatre pattes à la hauteur de ses fameuses jambes et commençai l'exploration, millimètre par millimètre. « Pourquoi faites-vous cela ? », demanda-t-elle, la voix chargée de féminisme ? « C'est que, répondis-je l'air étonné, je veux voir où cela va me mener ! »« Et où pensez-vous que cela va vous conduire ? » « Directement devant le juge, si je poursuis trop loin. » « Êtes-vous fétichiste, par hasard ? » « Non, je suis plutôt unijambophile ! repris-je, en langage d'édition cela ne veut pas dire que je mange uniquement du jambon, mais plutôt que je ne tripote qu'une seule jambe à la fois... en gardant l'autre pour le dessert. » « Vous m’apprenez un nouveau mot », me dit-elle. « Avant longtemps, ma petite, vous allez connaître tout le vocabulaire de l'édition. » « D’après ce que je peux voir, vous êtes plutôt du genre fringant, puisque vous me caressez déjà le haut des cuisses. Pensez-vous à monsieur le juge ! » « Non, votre Seigneurie, c'est que je dois éviter de laisser de l'espace blanc entre le paragraphe des cuisses et celui des petites culottes ; vous n'allez pas m'apprendre mon métier tout de même ! »
« Mon deuxième roman sera publié, poursuivit-t-elle, car malgré tous les obstacles précités, mon éditeur a une obsession pour mes jambes. » Comme j'avais la même fixation que lui, je lui demandai de pouvoir visiter son lieu de création, avec en tête une idée de récréation et peut-être même de procréation ! Dès qu’elle fut calée dans son fauteuil préféré, mimant le petit chien, je me suis mis à quatre pattes à la hauteur de ses fameuses jambes et commençai l'exploration, millimètre par millimètre. « Pourquoi faites-vous cela ? », demanda-t-elle, la voix chargée de féminisme ? « C'est que, répondis-je l'air étonné, je veux voir où cela va me mener ! »« Et où pensez-vous que cela va vous conduire ? » « Directement devant le juge, si je poursuis trop loin. » « Êtes-vous fétichiste, par hasard ? » « Non, je suis plutôt unijambophile ! repris-je, en langage d'édition cela ne veut pas dire que je mange uniquement du jambon, mais plutôt que je ne tripote qu'une seule jambe à la fois... en gardant l'autre pour le dessert. » « Vous m’apprenez un nouveau mot », me dit-elle. « Avant longtemps, ma petite, vous allez connaître tout le vocabulaire de l'édition. » « D’après ce que je peux voir, vous êtes plutôt du genre fringant, puisque vous me caressez déjà le haut des cuisses. Pensez-vous à monsieur le juge ! » « Non, votre Seigneurie, c'est que je dois éviter de laisser de l'espace blanc entre le paragraphe des cuisses et celui des petites culottes ; vous n'allez pas m'apprendre mon métier tout de même ! »
Ainsi,
je lui enseignai l'édition une bonne partie de la nuit... À
l’aurore, je lui demandai (je suis quand même un honnête homme)
de me montrer son manuscrit. « Je n'ose pas, dit-elle en baissant
les yeux, un livre c'est tellement personnel ! » J'invoquai le
secret professionnel et j'ajoutai que le chansonnier Brassens qui
m'avait fait trouver « des jambes de reine »... Et, après
d'autres audaces de plume autour du plumard, elle céda et consentit
à me montrer son travail. Par Mauriac ! Par Gide ! Par Pagnol !
c'étaient deux cents pages dignes de Gabrielle Roy ! J'allais lui
suggérer avec délicatesse de mettre son manuscrit à la poubelle
lorsqu'elle fit un décroisement de jambes qui méritait le prix
Goncourt ! Son talent était indéniable ! « Vous êtes géniale !
», lui dis-je en état de grâce, et en lui écartant les jambes
davantage, un peu comme un bon prêtre ouvre son missel entre les
fesses de son enfant de chœur. « Je vous engage comme nègre,
lança-t-elle avec joie, et l'Académie Goncourt aura, elle aussi,
son nègre.
Je
laissai dormir mon petit brouillon dans l'appartement et j'allai dans
un bar de danseuses pour mijoter un autre plat et abattre d'autres
cartes qui me rapporteraient également des sous (je suis joueur,
capitaliste et décadent!). Je fis ainsi la connaissance de Fatima,
une petite perle turque, venue du moyen orient. Musulmane, mais pas
folle, je vous assure, elle était accompagnée de son frère,
Mohammed la Saucisse de Turquie, qui suivait son cul partout où elle
allait ; les femmes musulmanes ont absolument besoin de surveillance
de la part des membres de leur famille (il faut toujours qu'elles
demandent la permission qui à leur père, qui à leur frère, pour
faire quelque chose). Assis auprès d’elle au café, Mohammed
surveillait jalousement sa vertu, et quand je glissai amicalement ma
main sur la cuisse de la jeune Turque, en guise de présentation, il
me sauta à la gorge, vif comme une panthère. Heureusement, il avait
oublié d'apporter son arme blanche ! Je trouvai sa réaction un
tantinet animale et familière, car nous n'avions pas gardé les
cochons ensemble, comme disent les Français bien élevés. Je me
dégageai de son emprise amicale en utilisant un truc d'autodéfense
féministe. Il me traita d'impur et me lança une bordée d'injures
du grand Prophète. En guise d’accommodement déraisonnable, pour
calmer le jeu, je leur offris un verre d'alcool, accompagné de
jambon frais. Mohammed refusa net, en son nom personnel et au nom de
sa sœur (évidemment), car cela contrevenait aux principes du Coran
qu'il cita très longuement. Mon enthousiasme envers la poupée
turque, qui avait pourtant un cul superbe, déclina comme un quartier
de lune bizarre s'éteint sur l'Orient quand les chameliers se
prennent le chameau avant de s'endormir, parce que je n'avais pas le
goût de me faire vomir toute la littérature ottomane. Les dattiers
orientaux, gorgés de sève, m'excitaient bien sûr, mais il y avait
un gros noyau (son frère) dans le fruit !...
Je
m'apprêtais à partir sans demander mon reste quand un gros
bonhomme, gonflé par l'obésité et les gaz infects de la bière
canadienne Molson, portant imperméable, chapeau noir et souliers
vernis comme dans les films de série B, entra brusquement dans le
café. Il regarda nerveusement autour de lui et me dévisagea. Il se
dirigea droit vers moi et me dit les dents serrées : « À Montréal,
j'ai vu ta photo dans le bureau de mon patron. Tu lui dois trente
mille dollars pour avoir répandu la rumeur selon laquelle son chien
sentait la grosse mama italienne. » Quand on m'apostrophe ainsi, moi
aussi, je suis capable d'apostropher et de mettre de l'insolence dans
mes répliques : « Va dire à ton enfoiré que je maintiens que son
chien projette des odeurs de grosse mama italienne. En plus, c'est un
chien bâtard ! » L'inconnu sortit un revolver qu'il tendit au bout
de son gros bras canadien de merde. Je figeai. Mais, aussitôt qu'il
aperçut le flingue, le rigoriste musulman, Mohammed La Saucisse de
Turquie, qui craignait que sa sœur ne soit témoin d'un meurtre
(c'est interdit par le Coran), réagissant comme la terrible panthère
dont j'ai parlé plus haut, émit un rugissement épouvantable et lui
administra un punch aussi foudroyant que celui qui a fait flancher
les genoux de Joe Frazier, au septième round, dans son combat de
championnat du monde contre Mohamed Ali. Le collecteur italien vit un
paquet de tomates roses, des sereins bleus, et beaucoup d'autres
choses que je ne peux décrire décemment, car les enfants savent
lire et que cela pourrait les troubler ! J'en profitai pour lever les
feutres.
Je
retournai, le cœur haletant, à l’appartement de mon écrivaine
pour savoir où elle en était rendue dans sa décomposition. « Tu
es blanc comme un drap ! dit-elle, aurais-tu fait une mauvaise
rencontre ? » « Pas du tout, lui répliquai-je, je ressentais le
besoin d'être avec toi. » « Comme tu es romantique ! Moi aussi, je
m'ennuyais de toi. »
Après
ces tendres aveux qui vont faire baver d'admiration les féministes
et les inciter à casser leurs chaînes pour dire « Oui » à
l'amour, j'enchaîne...
Puisque
j'avais des réserves sur son manuscrit, je proposai à mon écrivaine
de séduire le jury du Goncourt avec un propos plus léger, conforme
à la philosophie rétrograde de ces messieurs ; je lui suggérai
d'écrire la biographie de Ding Dindon, un dirigeant chinois, décoré
par le parti, qui faisait partie des brillants qui ont réprimé la
manifestation de la Place Tien'Anmen en 1990, en chassant des
étudiants désarmés. Mon bas-bleu, faisant preuve d'une étonnante
maturité, exprima son désaccord : la bande de macaques des
Affaires étrangères va nous sauter dessus comme des gorilles
sautent sur des bananes. Ces apparatchiks mènent la politique
internationale française comme on dirige un corps de clairons :
beaucoup de bruit, beaucoup de vent et des résultats médiocres !
Ils bombent le torse devant le Chinois, l'Américain et l'Allemand,
mais « ce sont des veaux ! » aurait dit le Général Charles de
Gaulle avec son regard d'aigle. Puis, elle émit un doute : «
J'ai beau avoir de très belles jambes, les vieux cochons du Goncourt
bandent-ils encore ? »
Par
dépit, je lui ai proposé d’écrire l’histoire du lion affamé,
amoureux fou d’une gazelle, et qui, au lieu de la dévorer, se
laisse mourir de faim. Cette fable métaphysique piqua au vif mon
écrivaine ; elle me traita des mots les plus durs : « théologien
», « moine déchaussé » « prêtre », « cochon d'évêque »,
« suppôt de cardinal », et elle m’accusa, comme Socrate, de
vouloir corrompre la jeunesse : « Ta gazelle, petit malin,
c'est Mémère Teresa, et ton lion, c'est feu le pape Jean-Paul II.
Ton histoire, dit-elle la bouche écumante, est pleine de
sous-entendus. Comment avec pareil sacrilège, une cochonnerie au
deuxième degré, vais-je pouvoir faire craquer les gens de la
deuxième Académie, qui peinent déjà à saisir un roman au premier
degré ? » Me jetant un regard oblique (elle écoutait toujours du
Brassens), elle m’ordonna de composer d’ici trente jours, en
quatre cent treize feuillets, pas un de plus, une nouvelle Comédie
humaine, sinon elle me flanquait à la porte. Or, en tant que nègre,
je revendique la dignité des Noirs, même si je suis un Blanc.
(Lecteurs, me suivez-vous toujours ? Ce n'est pas le temps de dormir
votre vie, même si je vous raconte une histoire à dormir debout !)
Et comme je n’avais nulle envie de faire de l’ombre à Balzac et
surtout être obligé de quêter ma pitance, je lui proposai un
nouveau plan d'épargne ; une nouvelle aventure qui raconterait la
passe d’un homme politique de l'Hexagone avec un enfant mineur,
lors d’un voyage en Asie. « Je ne veux pas un autre reportage sur
les scouts, ça manque d'originalité ! », me dit-elle. Et, pour une
fois, elle visait juste.
En
lorgnant ses jambes avec mélancolie, je poursuivis : « Je te
propose les plus forts sujets, tirés de l’Histoire sainte, qui
vont faire de toi une écrivaine célèbre, encore plus merdeuse que
Valérie Trierweiler. Chérie, ne boude pas ton bonheur : tu vas
pouvoir réaliser le rêve américain tout en restant à Paris.
Chaque année, les actrices et les acteurs français les plus
rampants de l'heure font déborder leurs culottes de rétention, à
Cannes, devant des producteurs hollywoodiens de série B, pour
réaliser ce rêve et, toi, avec la bombe de mon manuscrit et
l'éloquence de tes jambes, tu pulvérises le jury Goncourt et la
France entière te consacre comme sa nouvelle Sagan ! »
Cinglante
et impériale, elle objecta : « Ton talent incommensurable, cher
nègre, a-t-il déjà été couronné par quelque prix littéraire ?
As-tu au moins publié quelque chose dans une maison d'édition
reconnue ? As-tu déjà été révélé comme grand écrivain au
Québec en publiant un livre de recettes, seule spécialité des
éditeurs québécois ? Et dernier coup de poignard : « Comment se
fait-il que d’autres, moins talentueux que toi, remportent le
Goncourt, sans avoir de maîtrise en littérature française de
McGill university ?
»
Cette
deuxième flèche de Guillaume Tell (celle qu'il tenait en réserve
pour tuer le bailli), au sujet de mes études littéraires à McGill
university, m'alla droit au
cœur. Mon diplôme manquait de vernis, je le savais bien, alors,
dans un geste théâtral, empreint de grande dignité, je dis à ma
poupée de plume que j’avais oublié de mettre mon réveil-matin à
l’heure normale dans ma chambre d'hôtel. Cette opération ne
pouvait être différée, car la minuterie était reliée à une
bombe à retardement qui pouvait exploser à tout moment. La jeune
écrivaine au talent insondable, mais aux jambes sublimes, manifesta
autant de surprise que si je lui avais débité un mensonge. C’est,
chers lecteurs et lectrices, le moment le plus touchant, le plus
troublant, le plus poignant de cette série de vacheries, qui
m'arrache le cœur : les femmes ont toujours l'impression que je mens
quand je dis la vérité, et lorsque je dis vraiment vérité, elles
sont sûres que je mens ! Ce paradoxe a empoisonné toute ma vie au
point où désormais je partage mon lit avec une poupée gonflable
qui ne se dégonfle pas.
J'étais
perdu ! Le clergé, qui court à toutes jambes depuis un bout de
temps, voulait m'excommunier et même Frigide Fardeau, qui veille
sur ses proches, les testicules des animaux morts (auraient-ils donc
une âme?), prenait ses distances avec moi : je lui avais envoyé
une couronne mortuaire pour les canards qu'elle avait bouffés dans
un resto gastronomique et astronomique de Paris, et l'avaricieuse
m'avait refilé son dessert : la douloureuse du repas.
Malgré
tout, j'estimais être un bon nègre ! Petit bémol, côté fric :
j'avais besoin d'un sérieux remontant pour éviter me faire dépecer
vivant par l'usurier qui me poursuivait de son amour obsessionnel. Je
comptais sur la force de ma libido pour me tirer d'affaire. J'étais
quand même optimiste bien que ma sœur Anne (ma muse) n'ait pas vu
poindre la moindre jeune fille exploitable à l'horizon. Que
devais-je faire ? Soulager les vieilles femmes riches ? Elles veulent
nous faire payer leurs chirurgies plastiques ! Extorquer les avocats
les plus véreux? Le Barreau les recouvre de son hypocrite manteau !
Téter les vieux ? Ça fait fondre la succession ! Kidnapper un
millionnaire? C'est risquer de se faire doubler par des policiers
ripoux ! Torturer un Père missionnaire ? L’Église applaudit les
martyrs ! Faire de la peine à Mémé ? C'est risquer de se faire
cracher dessus par la Société protectrice des animaux. Enfin, il y
avait cette fameuse épée de Damoclès suspendue au-dessus de ma
personne qu'on avait mise à prix et le compteur de mon gérant
italien tournait plus vite que Katérina, ballerine et libertine du
Bolchoi, qui vire comme une toupie autant dans le lit que sur la
scène ! J’avais beau examiner l’équation dans tous les sens, la
gélatine de mon cerveau figeait comme le fleuve Saint-Laurent au
mois de février. J’eus soudain une idée renversante comme celle
de Saint-Paul tombant en bas de son cheval : pourquoi ne pas fonder
ma propre religion ? Dans notre société capitaliste, œuvrer comme
pasteur, c’est payant, c’est bien vu comme profession et ça
attire les enfants mineurs en autant qu'on fournisse les bonbons !
Frappé par cette évidence, je m’installai dans un parc en
débitant avec ma voix de stentor un premier sermon pour attraper des
poissons. Ce n'était pas le sermon de la montagne, car j'étais en
terrain plat. Cependant, je mis toute l'énergie du diable à éructer
que j’étais plus pauvre que Job, qui, lui, avait un tas de fumier
! Et quand on connaît le prix de cette denrée, on a du respect pour
la religion !
À
ma grande surprise, une foule de gens intéressés par mes propos
éthyliques sur le dieu Parminou, mon nouveau Guide céleste, se
pressèrent autour de moi. Je déposai mon chapeau par terre et, en
moins de deux, il se remplit d'argent aussi vite que les corbeilles
de pain de Cana, sans que je ne sois obligé de soûler mes invités
comme le divin maître.
Mon
avenir rosissait comme les fesses d’une fermière devant le soleil
féroce de juillet !
Parminou
(mon mentor céleste) est bon, me dis-je; il m’a fait découvrir ma
vraie vocation, celle de prêcheur. Gonflé, superbe et macho comme
un cardinal romain, j’affirmai à mes auditeurs qu’un curé sans
église était comme une putain sans son Jules ; il lui faut un lieu
pour dire la messe, un endroit pour confesser et un lit pour
forniquer (j'ai dit cette dernière remarque en latin pour ne pas
trop ouvrir mon jeu et faire comme les prêtres catholiques). Lisant
dans leurs yeux qu’ils ne voulaient pas m’abandonner, je leur
jurai qu’ils pouvaient sauver leur âme en me donnant encore plus
d'argent qui servirait à construire cette belle cabane ultramoderne
avec toutes les commodités. Un vieux malcommode, pour me tirer la
pipe, me demanda quel serait le nom de ce nouveau lieu de culte
puisque tous les prénoms étaient déjà vampirisés par l'Église
catholique ! Éclairé par la lanterne de Parminou (qui n'éclaire
pas beaucoup, faut croire), je répondis qu'il s’appellerait
Le Temple surnaturel de Jules et Jim et
qu'il serait à vocation bisexuelle. En combinant les prénoms de ces
deux gigolos, j'attirais à la fois les fans de Jules et les
adorateurs de Jim. « Quel sera votre nom de pasteur ? », insista
mon vieux christ. « Je vais m’appeler le Pasteur
Non-Pasteurisé, plus blanc
qu'une pinte de lait, plus pur qu'une bouteille de vodka et plus sec
qu'un vin médiocre de Californie », dis-je à mes paroissiens
assoiffés.
Tout
fonctionnait à merveille, mais pendant que je collectais l’argent
de cette quête spéciale, un vieillard m’annonça que sa douce
était morte de façon violente dans un salon de bronzage. La
technicienne de service, au lieu de la faire bronzer avec la recette
du soleil de Tahiti, l’avait fait rôtir en suivant la recette du
porc doré d'un grand chef musulman. Elle s’est bien aperçue que
de grosses gouttes de graisse s'écoulaient le long de son corps, et
au lieu de se demander si elle n’avait pas forcé un peu la
température, la chère idiote consulta les instructions qui,
malheureusement comme cela arrive très souvent au Québec, étaient
rédigées en anglais. Avant de recevoir la traduction de l’Office
de
la langue française, en
douze copies certifiées, sa vieille avait déjà entièrement brûlé.
La technicienne proposa de livrer cette carcasse aux clients d'une
pizzeria toute proche, mais elle fut refusée parce qu'elle n'était
pas Italienne de souche et que la sauce était trop brune. Aussi, on
envoya tout le paquet encombrant au salon funéraire où le prêtre
catholique de service, allumé comme un cierge, récita les prières
d'usage.
Le
vieillard, en vérité, était bien content de se débarrasser de sa
vieille momie, mais il aurait préféré un dénouement plus naturel.
Les remords le tenaillant, il vint me consulter et me demanda combien
ça coûterait pour que sa vieille soit expédiée directement au
paradis ? Sachant qu'il avait un gros bas de laine, je lui dis :
« Avec un dépôt de cinq cent mille dollars transféré directement
dans mon compte, elle ira tout droit au paradis sans transit par le
Purgatoire et sans transit intestinal, j'en donne ma parole de
Pasteur Non-Pasteurisé.
» Le vieil homme trouvait la somme impressionnante, mais comme il
avait un très gros bas de laine et des remords plus gros encore, je
l'ai convaincu que seul le montant réclamé parviendrait à apaiser
sa souffrance morale. Il accepta ma proposition. Je me rendis donc au
salon funéraire, et après avoir fait mijoter une prière de mon
invention, j’assurai mon vieux fidèle que sa chère femme, même
si elle sentait encore le brûlé, était déjà rendue au ciel, j’en
avais la preuve ; j'entendais toussoter le bon Saint-Pierre qui
réagissait à l'odeur du rôti et mon ordinateur portable avait
craché de la boucane blanche et de la poussière quand j’avais
décliné sur le clavier le nom de baptême de la vieille. Le vieux
charbonnier, ignorant que mon ordinateur rendait l'âme, goba cette
explication, et dans les jours qui suivirent, son notaire me remit
l’argent convenu, soit un demi-million de beaux dollars, tous
honnêtement gagnés. L'officier public, sachant que j'étais plein
aux as, me fit promettre de ne pas courtiser sa femme qui avait la
fâcheuse manie d'écarter les jambes devant un gros paquet d'argent
(joli défaut!), et de ne pas insister pour demander en mariage sa
sœur maigrelette, âgée de quatre-vingt-cinq-ans, encore vierge et
névrotique. Le salaud exigea en plus que j'appose ma griffe sur un
document légal le dégageant de toute responsabilité.
Grâce
à ce joli paquet d'argent, je pris un vol pour revenir à Montréal
avec l'intention de me la couler douce un certain temps. Il faut dire
que les étrangères que j'avais rencontrées m'avaient coupé le
sifflet. J’avais hâte de renouer avec les Québécoises qui aiment
le sexe, et qui respirent le naturel et la liberté. C'est du moins
la prétention des jeunes féministes québécoises qui font la queue
devant les bureaux des gynécologues.
Une
brunette aux mèches roses et fofolles me tomba dans l’œil dès
mon arrivée. Je la baptisai Flamant Rose, en l'honneur de mémère
Teresa, qui voyait l'univers en rose, et que le pape polonais avait
réussi à dompter, même si elle avait la fesse rétive et le
caractère farouche. Voulant faire l'imitation du pape (à défaut de
faire l'Imitation de Jésus-Christ), je décidai d'apprivoiser ma
greluche rose. J’estimais (un homme se trompe rarement!) que je
serais comblé si je vivais avec mon Flamant Rose comme animal de
compagnie en privé, et comme parure en public. Y a-t-il d'autres
femmes que Frigide Fardeau pour faire preuve d'un pareil
désintéressement ? Cependant, dans l'immédiat, je devais résoudre
un petit problème personnel qui affecte les messieurs quelquefois au
cours de leur vie ; j'avais la queue qui brûlait et je ne pouvais
pas compter sur les pompiers de Montréal, qui nous ont fait défaut
tellement de fois, pour éteindre la blennorragie que j’avais
contractée dans l'avion Paris-Montréal en galopant dans les
toilettes avec une allumeuse de métier, l'hôtesse en l'air, qui en
avait allumé bien d'autres en suivant son plan de vol régulier !
Comme l’agence de voyages refusait de couvrir les frais de mon
traitement médical, je poursuivis la compagnie d’aviation pour
cruauté envers un passager. La poursuite crasha parce que je ne
pouvais prouver l'intention malicieuse de l'hôtesse en l'air, qui me
fit à la fois un doigt levé et un doigt mal élevé ! Craignant
que mon petit capital, encore intact, ne fonde en frais d’avocats
aussi rapidement qu'un bloc de vierges fond sous le maquereau, je
résolus de laisser tomber l’affaire. Mais l’affaire ne me laissa
pas tomber. Les infections se succédaient à un rythme d’enfer. Je
n'eus d'autre choix que de plaider à Flamant Rose que si je ne la
touchais pas, c'est parce que je la respectais comme la Sainte
Vierge. Elle entra dans une sainte colère ; elle trouvait humiliant
de se faire comparer avec une inconnue, venue de nulle part, qui
trompe son mari avec un coureur de jupons notoire, venu directement
du ciel (alors qu'il arrivait du bordel), qui se fait appeler «
Esprit-Saint », et qui, de « l'Esprit » , a surtout l'esprit
présent (celui d'avoir flairé la bonne affaire) ! À regret, elle
accepta de mettre le couvercle, pendant un certain temps, sur mon
ardeur sexuelle si j'apprenais par cœur (c'était une sacrée
vicieuse !) toutes les statistiques de l’équipe de hockey minable
locale, les Chaudrons de Montréal. Ainsi, au lieu de lui susurrer
des mots d'amour, que du reste je ne croyais pas comme tous hommes,
je lui récitais en guise de placebo les dernières statistiques du
club poche de Montréal qui (avalez, chers amateurs, la pilule)
croupissait dans le fond du classement. Et comme Flamant Rose avait
de la suite dans les idées, me voilà, un bon samedi soir, à
l'asile du Centre Bell de Montréal, au milieu d’une foule de
surexcités et de débiles mentaux venus du Québec profond, prêts a
payer un prix complètement fou, pour roter de la pisse Molson en
voyant perdre l'équipe majoritairement anglaise. Après la première
période, qui m’avait paru plus longue que la crosse d'un évêque
(au propre et au malpropre!), mon Flamant rose, bondissant
soudainement de son siège, dit : « Je veux faire une déclaration.
» « Pas question ! », lui répliquai-je en la pressant de se
rasseoir, car nous ne sommes pas mariés ». « Penses-tu , pauvre
idiot, cracha-t-elle en cherchant visiblement la confrontation, que
seules les femmes mariées ont des droits ? Nous, les femmes
célibataires, nous avons plein de choses à dire. » (Pour avoir des
choses à dire, gagez, messieurs, qu'elles en ont?) Comme j'ai reçu
une belle éducation catholique avec récitation du chapelet chaque
soir à sept heures, douches d'eau bénite froide, bouffes aux
hosties sans cholestérol, sermons sous hypnose et assurance de mort
avec extrême-onction, c'est dire que j'en ai avalé des
couleuvres... De sorte que j’ai appris aussi à ne jamais
contrarier une femme en public...(C’est comme fouetter un enfant de
chœur en plein congrès eucharistique, il paraît que c’est très
mal vu par la Société protectrice des cardinaux !) Alors, je l'ai
laissé parler. Flamant rose sortit de sa sacoche un document
qu’elle commença à lire devant les personnes de ma section : «
Je déclare solennellement que je ne suis pas une « fille
de rien ». Les gens autour de
moi me regardaient avec suspicion. Surtout les femmes qui m'avaient à
l’œil. Je répondis : « Bien sûr, ma chérie, tu n’es pas une
« fille de rien »,
je sais très bien que tu n’es pas une « fille
comme ça ». « Je ne suis
pas une « fille comme ça »,
non plus ! » « C’est évident que tu n’es pas une « fille
comme ça » puisque tu n'es
pas une « fille de même »
! » « Toi, le brillant diplômé en français de McGill
university, ne ris pas de moi,
l’heure est grave, car nous allons peut-être nous séparer. » «
N’anticipons pas sur le reste de la soirée, ma belle »,
grommelai-je. « C’est ça, prend moi pour une tarte ! » Quand je
vis qu’elle entartait notre belle langue française pour me
ridiculiser et qu’elle s'apprêtait à peindre en public le tableau
craquelé de mes malheurs, je pris une profonde respiration et je me
levai tout droit avec la dignité d’un cardinal, emmêlé dans son
cache-sexe, qui s'agrippe à sa crosse comme un noyé s'accroche à
une bouée de sauvetage. Je lui dis nonchalamment que j’avais
oublié de fermer à clé les portières de mon automobile et que je
craignais de me faire voler. Comme nous étions venus en métro,
Flamant rose fit une moue de scepticisme qui dénotait un soupçon
d’intelligence. Bon joueur, je la félicitai pour sa perspicacité.
Et comme j'avais envie de me rendre prier à l’Oratoire
Saint-Joseph pour faire guérir
par le Frère André ma maladie vénérienne, je l'abandonnai
froidement comme Frigide Fardeau va abandonner, à son décès, ses
amis les bêtes, qui lui en seront très reconnaissantes !
Je
connaissais la réputation de l’Oratoire
qui avait remonté dans l’échelle de Richter des lieux de
pèlerinage grâce à la réputation du Frère André, le portier de
l’institution, qui venait d’accéder à la liste réputée des
saints et des dangereux. J'ignore toutefois sous quelle catégorie,
il était classé.
Pour
entrer dans ce temple chrétien, je devais au préalable monter un
escalier, plus haut que l’échelle de Jacob, mais moins dangereux
que l’échelle des bas de soie de la belle Portugaise cinglée qui
montait à genoux chacune des marches en disant des vacheries au bon
Dieu. Rendue en haut de l’escalier, la folle bestiole se mit les
bras en croix. Elle embrassa tout Montréal d'un seul regard et,
faisant un doigt d'honneur et quatre autres de déshonneur à la
cité, elle bénit le ciel de lui avoir foutu les genoux en sang.
Quand j’ai vu qu’elle était dérangée à ce point, je ne puis
m'empêcher de la prendre pour moi, avant qu'un brave curé ne la
prenne pour lui, disant l'avoir vue en premier. Me drapant de ma cape
de Tartufe, je lançai la conversation sur les mystères divins. La
beauté des mystères divins, mes chers amis, c’est précisément
qu’ils sont mystérieux. Personne ne les connaît, donc personne ne
sait de quoi il divague. En somme, ça permet d’attirer la poule
sans qu’elle sente la présence du renard !
Cette
Portugaise de choix, bien en chair, moins ronde que la tonsure d'un
moine, avait des appâts évangéliques qu’aucun chrétien n’aurait
dédaignés. Tout était bon chez elle, particulièrement la chair
blanche. Et comme on choisit l’aile ou la cuisse lors d’un repas
au resto le dimanche, je regardai le menu, et je fis sentir à la
belle qu’elle avait affaire à un fin connaisseur. Naguère, de
nombreux prêtres s'étaient aventurés à la séduire, mais comme
ils manquaient d'éducation et de doigté, ils avaient échoué tout
près du but, tant la mouche était farouche ! Visiblement, ils
avaient pris pour modèles les cardinaux qui fréquentent les bordels
de Rome ! Avec moi, elle craqua dès qu'elle me vit faire une
génuflexion pleine de savon sur un prie-Dieu au tissu rugueux, et en
même temps, mitrailler, dans les dix secondes réglementaires, cinq
« je vous salue Marie... couche-toi-là ! » Le miracle était
accompli ; elle accepta mon invitation de prendre un café.
Auparavant, catholicisme oblige, elle devait aller roter son rosaire,
se confesser et faire son chemin de croix ; la routine religieuse
quotidienne d'une gymnaste de Dieu pour compléter ses échauffements
spirituels !
Bon
prince, je l'accompagnai dans son chemin de croix, et quand le Christ
fit une troisième chute, je jurai à ma poule que ce n'était pas
moi qui l'avais fait trébucher. Cela resserra le corset de sa foi.
Je contemplai les vitraux et les tableaux accrochés aux murs de la
chapelle qui démontraient que les catholiques ne sont pas tous des
fauchés. En lisant la brochure offerte aux visiteurs, je tombai sur
un texte consacré au Frère André. Sa réputation de vendeur
d’huile m’était connue, celle de l'homme prude me l'était
moins. J'appris qu’il avait l’habitude de demander aux femmes qui
entraient dans l'église d’enlever leur chapeau et de couvrir leurs
chastes épaules d'un châle pour ne pas offenser le Seigneur (comme
les taureaux deviennent fous de rage en voyant du rouge, Dieu perd
les pédales en voyant le blanc des épaules des sautées). Frère
André avait sa petite théorie personnelle : il prétendait qu’en
priant Saint-Joseph, le roi des cocus, et en se graissant d’huile
sans se frotter le gazon, les dames se mettaient en meilleure
position pour accueillir des miracles. Humble serviteur, Frère
André, ne s'attribuait pas tout le mérite de ces guérisons ; il
les imputait au cocu Lui-Même suivant le précepte « quand on est
valet, on n’est pas roi ». Et grâce à ce montage habilement
huilé, l’Oratoire
vendait plus d’huile dans la métropole que les pétrolières. Même
en plein été, période habituellement creuse, les compagnies
d’huile faisaient des affaires d'or. L’argent coulait à flot
dans les coffres de l'Oratoire
et les prêtres se gavaient
comme des cochons. Apparemment tout baignait dans l'huile...
Mais
un jour, grand malheur pour la communauté religieuse, le Frère
André que l'on croyait immortel, fut appelé dans l'au-delà par le
divin maître pour rendre compte de ses activités graisseuses. Les
affaires périclitant, ici-bas, en son absence prolongée, la
Confrérie de l'Oratoire décida de mousser sa candidature pour en
faire un saint et la brochure que je lisais en ce moment même
mentionnait qu'il ne manquait plus que trois voyages de camions
d'huile pour que le Frère André soit considéré comme saint. Voilà
le vrai miracle de l'Oratoire !
Après
le chemin de croix, je concentrai toute mon attention sur ma belle
Portugaise que je souhaitais ajouter à ma collection d'icônes . En
guise de préparation, je l'amenai dans un petit resto dirigé par
des Québécois. Je tentai alors une opération hautement risquée ;
celle de glisser ma main sur sa cuisse en direction de sa tourtière
du Lac Saint-Jean. Son étonnement fut total, de même que son
abandon ! Après un détour par Alma pour voir Lucien Mouchard et un
arrêt à Chicoutimi pour prier avec le maire, j’arrivai enfin à
la cible de l’opération : sa belle petite culotte blanche. Pour
éviter qu'il ne commence à neiger et que la tempête ne prenne de
l'ampleur, elle s'empressa d'aller trouver refuge au petit coin. Cet
endroit, thème populaire de nombreuses thèses en psychologie,
permet aux dames, en position délicate, de refroidir leur libido et
de se ressaisir avant de retourner dans la zone dangereuse :
elles ajustent l'épaisseur de leurs crèmes, corrigent la ligne de
leurs paupières, rajoutent quelques gouttes de parfum (quand ce
n'est pas le flacon au complet)... en un mot, elles se font « belles
» pour mieux se croire belles et ferrer leur proie ou, au contraire,
elles en profitent pour calmer leurs hormones et filer à l'anglaise
sans devoir donner d'explications à un prétendant trop audacieux.
Ma Portugaise avait choisi cette dernière option : elle partit
sans demander son reste, me laissant seul comme un chien à méditer
sur la mort du Christ et sur les grands miracles du Frère André.
Sale
coup de couteau ! Revenu bredouille dans mon propre territoire de
chasse, mon estime personnelle dégringola comme si toutes les
marches de l'Oratoire
s'étaient effondrées dans un tremblement de terre. Je rasais les
murs de la métropole et je ne me rasais plus. Bref, j'étais en
pleine déprime lorsqu'un sans-abri, qui était sûr de m’avoir vu
fouiller dans les poubelles et qui voulait encourager un confrère,
me dit : « Man, réveille-toi, tu fais du lard ! Fais comme moi :
avale tes crottes, bouffe tes poux, régale-toi d'une couple de rats,
pas trop gras, avec le montant de ta prestation mensuelle, et fonce
dans la vie ! Si tu te nourris dans les poubelles, c'est que tu es un
gagnant ! (je n'avais jamais vu ça sous cet angle). Et même si ton
allure n'augure rien de bon, fais tatouer sur ta poitrine en grosses
lettres : « Je suis un BS ! » Et tu vas voir toutes les « belles
dames » bouffies par leur maquillage, avec vêtements griffés et
cul sublime, qui, au lieu de te mépriser (elles qui se font vivre
par leurs amants ou sont en couple parce que leur conjoint a de
l'argent), vont se retourner sur ton passage, se jeter à tes pieds,
rouler des « rrr » montréalais, et se rouler par terre avec
volupté comme si tu représentais le tapis rouge des Oscars en
criant comme des groupies : « « Oscar ! », « Oscar ! », «
Étends sur moi ta renommée ! » Au même moment de l'autre côté
de la rue, tu verras déambuler, fièrement drapé dans une longue
cape blanche en soie, un gros porc de fonctionnaire, gras, puant et
cave, requis d'urgence pour te couper ta prestation mensuelle, qui va
entrer au ministère avec deux heures de retard. Tu vas lui crier :
« Gros porc ! », « Sale porc !», « Qu'as-tu fait de ma
prestation ? » Il te répondra :« Est-ce que je suis
responsable de mon frère ? » Et il t'enverra une belle lettre te
demandant de rembourser tout ce que l'État t'a versé à ce jour ! »
« Est-ce ça la vie ? », lui demandai-je. Le sans-abri se réfugia
dans le silence.
J'ai
compris qu'il y avait beaucoup de lucidité et d'expérience vécue
dans ces propos et que nous vivions dans une société égalitaire («
de droit », proclament les pleins). C’était le discours le plus
pertinent que je pouvais souhaiter pour me sortir de ma léthargie.
Il venait de la bouche d'un homme humble, de ceux que l'on méprise.
Tel un homme d'affaires, je lui répondis chichement : « Man, si
jamais tu as besoin de t’acheter du savon, je t’en paye le quart,
je te le jure ! » « J'espère au moins que ça ne va pas te casser
! » dit-il, en marchant sans se retourner.
Ce
qui accroissait mon angoisse et faisait bouillir ma pression, c'était
le fait que mon fameux gérant de banque italien ne me donnait aucun
signe de vie. Quand un vrai mafioso néglige de se rappeler à votre
souvenir, les problèmes s'en viennent. Je n'oubliais pas que ce
salaud avait mis un contrat sur ma vie et que les Italiens de fraîche
crapulerie ont la fâcheuse tendance à faire de la saucisse au
fromage avec leurs ennemis. Je m'attendais à recevoir, un jour ou
l'autre, un coup de poignard dans le dos, suivant l'éthique de cette
société.
Les
jours s'écoulaient et je ressentais une certaine lassitude, celle de
celui qui a un peu de pognon pour se la couler douce, mais pas assez
pour faire la bombe en compagnie de la Jet set. Honnêtement, ce
contrat sur ma vie me donnait la chienne.
Je
décidai alors de m'aérer l'esprit en faisant une demande pour un
emploi, pas trop exigeant, très bien vu, et fort bien payé. Propre
comme un sou neuf et revêtu d'un complet de soie (à cause de mon
estime de soi), je me pointai à Radio-Canada,
la société qui prétend défendre la langue française, tout en
faisant la promotion du bilinguisme : cela s'appelle « tricoter
» et « détricoter » en même temps !
J'avais
comme intention louable de devenir célèbre et faire chier mes
concitoyens avec un gros salaire tenu secret, bien que payé avec les
taxes des Québécois. Un serf de service me reçut en français, la
langue seconde de l'institution. Il me conduisit auprès du directeur
du personnel, un grand efféminé taillé dans le satin, au visage
boutonneux, et au langage coulant comme le nœud du pendu. Jetant un
bref coup d’œil sur mon curriculum vitae, il m'affirma avec
contrariété que ma demande ne répondait pas aux critères de la
Maison. Je croyais pourtant avoir bien rempli le formulaire, quand il
m'expliqua que pour entrer à Radio-Canada,
je devais répondre à l'une des trois conditions suivantes : avoir
une matante comme répondant, produire un testament en règle en
vertu duquel le poste convoité m'est légué personnellement par feu
son titulaire ou, troisième condition, prouver de façon irréfutable
que j'étais publiquement sorti de la garde-robe. « Une matante,
poursuivit-il, c'est un titulaire actuel d'un poste à Radio-Canada
qui appuie votre candidature, en déposant entre mes mains une
enveloppe généralement brune. Un héritage en règle, c'est celui
par lequel vous perpétuez la personnalité juridique du titulaire
d'un poste à Radio-Canada
(remarquez que j'ai personnellement des doutes sur l'éthique de ce
procédé, mais ça fonctionne bien en ce lieu). Enfin, troisième
possibilité : vous êtes sorti de la garde-robe récemment et le
public en a été informé. Sans l'une de ces trois conditions, votre
candidature passe à la trappe. »
Ne
rencontrant aucun de ces trois critères, je sortis dignement de
cette auge fédérale de gens bien nourris par nos taxes québécoises.
Cette démarche m’avait indisposé physiquement et moralement, mais
je savais au fond de moi que je valais plus que ça.
J’entrai
ensuite dans un super marché m'acheter une boisson gazeuse pour me
désaltérer. En attendant de passer à la caisse, j’engageai la
conversation avec une jeune fille à lunettes, l’air intellectuel,
en train de lire une pièce de théâtre. J’appris qu'elle étudiait
en art dramatique et je respirai dans ses cheveux des embruns de mer
et de sels sauvages, en provenance de la Gaspésie ; ces parfums de
liberté contrastaient avec l'air vicié de la
Maison de Radio-Canada !
J'engageai la conversation avec Marie-Paule, c'était son nom, une
jeune fille sympathique qui étudiait en art dramatique et qui s'en
allait à ses cours. Elle me dit avec toute la candeur de ses
dix-huit ans que ma compagnie lui était agréable, et comme je
n'avais rien à faire, elle me proposa de l'accompagner à
l'université.
Dans
la salle académique, un acteur français dispensait aux talents
locaux sa conception du théâtre : « Le théâtre, pontifiait-il,
a besoin de lumière : c’est essentiel pour y voir clair !
Alors, posons la lumière dans cette pièce : je la mets par
terre derrière mon gros cul de paon vaniteux pour qu’elle
l'éclaire dans toute sa splendeur. Admirez mon beau cul ; c'est
celui d'un Sociétaire de la Comédie
Française ! Au lieu de
mendier mon pain dans la rue, en tant que sociétaire, je mange aux
frais de mes compatriotes dans les meilleures tables de Paris. J'ai
apporté pour étude la pièce « L’annonce faite à
Marie-couche-toi-là ! », c’est la première version, la version
hard, qu’a faite Claudel avant d'être foudroyé, derrière une
colonne à Notre-Dame-de Paris, par la grâce de Dieu qui avait
absolument besoin des lumières de ce dévot. Le grand écrivain,
secondé désormais par Dieu lui-même (qui, c'était génial, ne
réclamait pas de droits d'auteur) recomposa sa première tartine
qu'il rebaptisa simplement « L'annonce
faite à Marie » ; titre
anodin, angélique diront certains, qui généra beaucoup de fric et
accrut la foi et l’ego du grand auteur. Pour ce cours, nous
étudierons cependant la première version, la version hard, «
L'annonce faite à Marie
couche-toi là ! », car ce
Claudel me fait chier puisque je suis obligé de me taper la version
évangélisée vingt fois par année, et « j'en ai ras-le-bol ! »,
même si elle adoucit les fins de mois du vieil acteur que je suis. »
«
Mes enfants, maintenant que la lumière est bien posée, je
demanderais aux femmes présentes de se mettre à poil. On ne peut
pas réussir comme actrice sans dévoiler son corps, c'est une loi
non écrite, respectée par tous les réalisateurs et producteurs
modernes. Celles qui ont le corps gras et adipeux, quittez
immédiatement la salle et allez vous faire dégraisser par les
bouchers de la chirurgie plastique, vous ne méritez pas mieux !
Vous, la grosse, dans le fond de la scène, ne trichez pas : « Oui,
vos cent vingt kilos nous feraient oublier votre talent d’actrice.
Dommage pour vous, vous avez une belle voix, mais je dois vous
renvoyer, car le public va rire en voyant que vous ressemblez à une
montgolfière et que je n'ai pas de permis de piste d’atterrissage
! Et vous, là-bas, la petite échalote, ne vous cachez pas derrière
votre perruque, vous me tapez sur les nerfs ; vous avez l’air aussi
pincé que les cordes de clavecin d'une employée de Radio-Canada
! Déguerpissez, vulgaire fausse note ! »
Le
couperet du grand acteur avait épargné Marie-Paule, ma petite à
lunettes, maigre comme le fonds de pension d'un écrivain. S'étant
dénudée, le maître lui suggéra de lancer quelques répliques.
Elle s'apprêtait à les lancer quand le sociétaire lui dit: «
Faites attention en lançant ces répliques, si vous y allez trop
fort, vous vous allez finir par tuer une mouette et vous risquez,
maladroit, d'abattre celle de Tchekhov.
Ensuite,
sous prétexte de lui placer la voix, il posa ses mains directement
sur ses seins qu'il tripota avec tellement d'insistance (ça
ressemblait à du vrai théâtre) que la petite, encore confuse et
désorientée, mais pas folle, dit : « Merci, monsieur le curé ! »,
et se souvenant de la prose de Simone de Beauvoir, elle lui appliqua
un bon coup de pied dans la zone sensible pour la fierté masculine
et la santé mentale, de sorte que le bel étalon eut le souffle
coupé. Vaincu, il pleurnicha : « Puisque ces dames sont
réfractaires à l’art dramatique, je donne ma démission.
J’enverrai tout de même ma note de frais par mon avocat ; elle
sera chiante, car il est Français, et il vient tout juste de
découvrir que sa maîtresse couche avec un confrère. »
Si
ma petite à lunettes avait du cran, elle avait en plus le crin de
l'épouse parfaite. Je l'ai invitée à venir visiter mon
appartement, et au lieu de se réjouir de la beauté du nid d'amour
et de la salle de jeux que je l'invitais à partager, elle dit
bêtement comme ça : « Vous, les hommes, vous êtes tous des
salauds ! Tout ce que vous voulez, c'est nous baiser ! Vous n'êtes
qu'une bande de jouisseurs ! »
Elle
avait dévoilé son vrai visage : elle voulait jouer la fine mouche
devant l'Homme ! Ces étudiantes sont plus difficiles à dompter que
les chevaux sauvages ! Et puisqu'elle n'était plus la poupée idéale
pour moi (je cherchais une Barbie pour la promener au bout d'une
laisse dans les salons), je lui signifiai que les deux mille Ave que
j’avais commencé à réciter avec ma petite portugaise, lors de
mon passage à l'Oratoire
Saint-Joseph, alimentaient mon
anxiété et surtout ma culpabilité. J'ai réalisé que je ne
pourrais plus me regarder devant un miroir, si je ne m’exécutais
pas séance tenante. Une promesse au Bon Dieu, c’est une promesse
au Bon Dieu ! Ma belle Marie-Paule à lunettes, qui au fond était
une pudique du cœur, me demanda si, en réparation de la peine
qu'elle m'avait causée, elle pouvait offrir son temps de loisir à
faire la lecture des œuvres du Marquis de Sade à mes petites
nièces. Je lui répondis qu'elle m'avait tordu le cœur et que je ne
pouvais, même en bon chrétien, accepter sa proposition. Nous nous
quittâmes en bons catholiques : elle me permit de frotter, en signe
d'adieu, sa petite culotte, et m'assura qu'elle allait prier le
Frère André pour qu'il me débarrasse enfin de ma chaude-pisse.
Souvenir
éprouvant de ma vie : jamais je n'ai pu encore réciter tous
ces Ave ! Cela me remue encore à ce point que je consulte un
confesseur qui m'impose comme pénitence de ne pas regarder les
jambes des femmes plus haut que les genoux, suivant les techniques de
visualisation mises au point par les brillants théologiens du
Vatican. Ces techniques sont plus excitantes que des cours de
sexologie, car il y a des stages pratiques chez les jeunes filles
mineures et naïves (on apprend comment les attirer avec des
bonbons), et en plus dans le courrier on reçoit la photographie de
la catholique la plus prude du mois (des fois, on a des surprises
quand elle est habillée!). On apprend aussi les meilleurs trucs pour
observer des miracles avec comme récompenses de pouvoir déculotter
des sœurs, de manger la cerise des postulantes et de partager la
couche des novices.
Seul
comme le ver solitaire, rejeté par toutes les femmes, pour me
remonter le moral, je décidai de tenter un coup d'éclat : séduire
la vieille relique qui travaillait comme bonne dans ma paroisse.
Autrement dit, ma conquête finale serait la bonne !
Ma
rencontre avec cette pierre précieuse eut lieu lors de la veillée
des cierges pascals quand le célébrant prépare le saint chrême
suivant une recette culinaire séculaire
en
le mixant avec de l'eau bénite. Cette sainte pisse sert à bénir
les ivrognes et à requinquer les mourants, qui, comme on sait,
meurent quand même ! L’église conseille également l'usage de
cette eau pleine de vertus à tous ceux qui, en général, mènent la
vie plate des catholiques. Certains la boivent avec de l'alcool
(beaucoup d'alcool!), d'autres la prennent comme laxatif, au lieu du
sermon du dimanche.
Cette
bonne, qui était dans les bonnes grâces du curé, avait déplié
délicatement son gros cul de percheron sur le banc des marguilliers
en avant de l'église pour lui donner un peu répit. Comme j'ai
toujours aimé les défis et désiré me taper une grosse, je
m’avisai d'encanailler cette vieille fille, plus ronde qu'une boule
de billard, plus pure que l'eau d'érable, avec comme objectif de
semer dans son cœur sec un grain humide d’amour et de poésie qui
lui feraient croire que je l’aimerais éternellement. Beau
programme ! Belle mystification en perspective ! La belle émue par
ma présence me fit une moue vertueuse. J’étais bien décidé à
lui labourer le gazon, zone mise à l'Index, et à lui promettre,
pour arriver à mes fins, le mariage, la robe coûteuse, et même le
fameux voyage de noces à Rome pour voir les sous-vêtements
transparents du pape. Je me méfiais de la conclusion de la fable «
Perrette et le pot au lait »,
aussi, je jouai prudemment mes cartes. En m’avançant vers la table
de communion, tout en regardant innocemment le plafond pour recevoir
l’hostie sacrée, je fis glisser discrètement ma main sur les
fesses de la vieille relique, question de jauger ses réflexes moraux
et tester ses principes. Croyant qu'un miracle venait de se produire,
la bonne me gratifia d'un sourire évangélique. La barrière était
ouverte pour d'autres jeux possibles. Je lui glissai à l’oreille
que je l’attendrais sur le parvis de l’église à la fin du
spectacle religieux.
Nous
voilà donc sur le perron tous les deux ; elle, avec son gros cul de
cheval, et moi, avec mon lance-flamme en position de combat ; on
était faits pour s’entendre comme on dit dans les agences de
rencontre quand on réussit à accoupler deux sans-allure ! Puisqu’il
ne faut jamais mettre la charrue devant les œufs (ça fait baver
l'omelette), je l’invitai à communier au spectacle grandiose de la
Lune qui ce soir-là, signe du ciel, brillait comme les testicules du
Bon Dieu (un peu de poésie dans la nuit ne nuit pas au récit !). En
lui soufflant à l’oreille des mots gentils comme « ma poule au
nez dégoulinant », « mon affreuse calomnie » , « mon épouvantail
à puceaux », « ma biche hérétique », « ma cracheuse de
litanies » que j’accouplai avec des gestes indécents, j’allumai
la mèche de ses désirs enfouis au plus profond de son subconscient
(j'ai lu Freud, vous savez!). La vieille au comble de l'excitation
était prête à exploser comme la chaudière surchauffée d'une
locomotive à vapeur. Elle me dit que je la rendais heureuse, mais
que seul un contrat nuptial la comblerait de joie. Je devrais signer
un contrat, avec deux singes comme témoins, devant notaire, car, à
son âge, elle ne pouvait subir, sans risquer l'accident cérébral,
l'humiliation de la femme séduite et abandonnée, comme cela arrive
si souvent dans les romans tordus. Elle demandait l'impossible ;
c'est pourquoi sa proposition me plut ! Je lui ai répondu que tous
les hommes étaient des salauds, mais je lui jurai que je ne me
conduirais pas ainsi (j'avais l'intention de faire pire!). J'estimais
qu'elle avait parfaitement raison de réserver son cul précieux pour
ceux qui disposaient d'un certificat de bonne conduite : les
autres, les aventuriers de la cerise perdue, les partis dans le vent
et les partis pour la gloire, n'avaient qu'à faire comme Tintin
quand il se branlait devant les crocodiles au Congo (c'est une
version licencieuse de Tintin que l'auteur n'a jamais rendu publique
!). Je m’engageai à signer ce contrat qui ne me coûtait presque
rien, et qui pour elle signifiait presque tout.
Cependant,
l'expérience m'avait appris que pour manger la cerise, il faut
d'abord payer le gâteau. Elle eut alors une drôle d'exigence :
celle de m'obliger de suivre avec elle des cours de préparation au
mariage pour éviter de récolter, le soir des noces, des morpions ou
des champignons de Jacqueline, de Fernande, de Lisanne ou peut-être
même de Daniel ! J’acquiesçai. Puis (n'oublions pas qu'elle
rongeait son frein depuis longtemps) elle insista pour connaître la
méthode du Saint-Esprit pour devenir enceinte comme Marie, sans être
obligée d’écarter les jambes. J'ai protesté vivement : « Ça va
faire, gamine ! Est-ce que j'ai l'air d'un cocu ! »
Cette
réaction virile la tempéra quelque peu. Elle contre-attaqua en
insistant pour connaître cette fameuse sainte passe qui a permis de
rouler Saint-Joseph dans la farine. Comme ce dernier n'était pas
pâtissier, mais menuisier, il s'est fait varloper. Je fis un recul
stratégique et je consentis, en me voilant les yeux, à lui révéler
ce secret, seulement lors de la nuit de noces (lors de l'ennui de
noces!), ce que, bien honnêtement, je n’avais nulle envie de
respecter. La belle, croyant avoir affaire à un homme droit dans ses
bottes, m’invita à prendre le café chez elle, en présence du
curé, qui lui servirait de chaperon. Ce curé, avant de me laisser
seul avec la promise, me fit l'avertissement suivant : «
Monsieur, me dit-il avec respect, je vous laisse en présence d'une
machine qui n'a pas fonctionné depuis très longtemps, je vous
serais gré de ne pas essayer de la réchauffer en mettant vos mains
dans sa brassière pour avoir un feeling d'été, ni (péché mortel)
de lui entamer la tourtière : la garce pourrait s'emballer et le
mariage serait compromis. » Cet homme si avisé (je l'ai appris à
mes dépens) n'était qu'un sacré matou. Dès que j'allais fumer une
cigarette à l'extérieur, il tripotait sans vergogne les seins de sa
bonne. Preuve : je l'ai surpris, en revenant dans le salon, en
train de palper la boule A et de caresser la boule B (je les
distingue parce que j'ai étudié en géographie) dans le
soutien-gorge de ma future. Dès qu'il me vit arriver l'hypocrite, il
fit semblant de lire les psaumes de son bréviaire. Craignant que ça
chauffe, il décida que notre première belle rencontre d'amour,
entre la vieille folle et moi, était terminée.
Le
lendemain, il me reçut en privé au presbytère et il me confessa
que j’avais entre les mains une bonne fille, mise en réserve par
l'église, car personne n'en voulait. Depuis une cinquantaine
d’années déjà, les toiles d’araignée poussaient entre ses
cuisses, mais puisque je recherchais une relique et que je n’avais
pas la phobie des araignées, il acceptait (on verra pourquoi) de
tisser les fils de notre bonheur.
Ce
Tartufe, qui faisait semblant d'approuver ce mariage, voulait en
réalité la garder pour lui, car il la trouvait bien « bonne » !
« Jamais, je n’aurais cru, pleurnicha-il, qu'un bon catholique
serait fanatique au point de s'intéresser à ce jupon mal foutu ;
je craignais devoir la céder aux protestants qui sont
particulièrement vicieux, je vous prie de me croire. Quand je pense
que ces impies comme la reine D’Angleterre, dans leurs loisirs,
s'adonnent à la danse du poteau, je suis outré : jamais les
catholiques ne sont allés si loin ! Sur un ton de confidence, il
murmura : « Bien sûr, nous avons, nous aussi, nos perverses, mais
l’Église s'en occupe en privé.
Il
ajouta avec des trémolos dans la voix : « Aujourd’hui, voyez
comme Dieu est bon ! il accorde à cette paumée le grand privilège
de se marier ! À son âge ! N'est-ce pas miraculeux ! Monsieur,
continua-t-il en baissant la voix, vous êtes un brave homme, et si
vous adoptez un enfant un jour et que, par bonheur, c'est un petit
chérubin, je veux être le premier prêtre à le chérubaniser :
vous me devez bien cela, dit-il en citant un article du droit canon !
»
Le
curé, même si la bonne sentait le pain rassis, garantissait sa
virginité : « Elle est aussi pure qu'une relique et plus bleue
qu'un fromage vieilli », confessa-t-il. Il soutint même qu'un
avenir brillant flottait au-dessus de notre couche... de moutarde.
Mais, avant qu’il n’ajoute une autre beurrée aux qualités de la
dame, je lui demandai de régler l'affaire au plus vite, car je ne
voulais pas me la faire chiper !
Mon
cœur était pur, la suite va le prouver…
Un
bon samedi, vers les trois heures, quand les cloches, avec leurs
grandes dents crochues, croquèrent le silence de la paroisse
Saint-Luc, à Montréal, notre mariage devint officiel. La réception
se déroula bien, si j’omets de mentionner que trois des cousins de
ma femme, venus de si loin pour sentir de si proche, vomirent sur le
plancher de danse qui devint aussi glacé qu'une patinoire. Ma bonne
glissa par terre et sa belle robe blanche se souleva, dévoilant ses
cuisses d'une autre époque. Le curé, qui guettait cette occasion
depuis le début de sa vocation, sauta sur cette offrande et consomma
le mariage à ma place…
Loin
d’être abattu, j’arborais le sourire du vainqueur : l’occasion
était belle de feinter la déception et d'augmenter ma fortune pour
devenir un vrai millionnaire cette fois-là.
Je
fis appel aux meilleurs avocats véreux, ceux que le Barreau protège.
Ils réglèrent l’affaire rapidement auprès des autorités
ecclésiastiques, en menaçant de dévoiler publiquement que l'évêque
entretenait un petit mignon, mignon comme tout ! L'évêque, pris les
culottes baissées, n'eut d'autre choix que de faire payer par le
diocèse les frais juridiques très élevés découlant de
l'inconduite de se son curé !
Vous
me direz que ma conduite éreintait l'éthique et que le Barreau
aurait dû s’en mêler. Mesdames et messieurs, c'est un secret de
polichinelle : le Barreau s’emmêle toujours ! c’est d’ailleurs
ce qui fait son efficacité, et c'est la raison pour laquelle le
public est si bien protégé !
Officiellement
millionnaire, j’emménageai à la campagne pour l’été :
j’en avais assez de sentir la puanteur de Montréal et la
moisissure des petites culottes de nos prostituées, alors que,
pendant tout l’hiver, elles sentent le frais.
Loin
des escortes de la ville, je m'ennuyais à mourir à regarder pousser
les fleurs.
Je
fis un compromis : mes fins de semaine à Montréal, à lever la
pute sur les terrasses et dans les restos débranchés ; le reste du
temps à la campagne, à soigner mes blennorragies.
Un
matin, en lisant mon journal, j’apprends que se tient un festival
de poésie à Montréal, au mois d’août. Les colonisés culturels
de la place qui organisent ce genre de manifestation pour enrichir
leur curriculum vital, ont réussi à dénicher un quelconque poète
français pour présider l'événement, et trouvé un poète
québécois assez carpette pour agir comme vice-président. Que
voulez-vous, dès qu'on touche à la poésie, ça prend un président
frappé du sceau français et un tapis québécois.
Le
chevalier des Muses, grâce à une tartine pécuniaire
impressionnante, agrémentée d'une promesse de régal en femmes
faciles, accepta de venir concélébrer ce festival d'illuminés qui
ont tous leur niche dans l'anthologie des poètes québécois, sauf
Claude Péloquin, notoirement absent, qui avait sans doute omis
d'envoyer son enveloppe brune. Cette bible, reconnue par le milieu
malgré ses choix éditoriaux douteux (les meilleurs textes des
auteurs ne sont pas toujours en vedette), circule librement au
Québec, preuve que l'on publie vraiment n'importe quoi.
L'élu
du Parnasse, transporté par la poésie et par l'avion (on s'en
doute), gonflé par l'alcool, arrive à l’aéroport local. Les
photographes sont tellement nombreux qu'il se croit rendu au festival
de Cannes et du fric fric quand il descend de l'avion et que le
vice-président le reçoit à quatre pattes (réflexe du poète
québécois !). Une hôtesse en l'air ou, si vous préférez, une
travailleuse du sexe syndiquée, remet au voyageur un joli bouquet de
fleurs sur lequel il vomit. Comme il trouve la femme jolie, au lieu
de l’embrasser sur la joue, pour montrer sa belle éducation de
fils d'aristocrate, il lui arrache son chemisier. La demoiselle, qui
pourtant en a vu bien d'autres (c'est son métier), trouve que le
voyage lui a fortement ouvert l’appétit. Ce dernier réclame
alors, avec insistance, sa tétée et, essuyant un refus catégorique,
pour se venger, il pratique sur elle le détroussage domestique. Des
agents d'insécurité interviennent. Le poète les repousse en leur
récitant à la volée du Cocteau dont l'effet est plus efficace que
le poivre de Cayenne. Néanmoins, les surveillants se ressaisissent,
le maîtrisent, et le revoient par le prochain avion. Les gens du
festival appellent Radio-Canada pour raconter l'événement. Ils sont
reçus à Tout le monde en
parle. Et le Québec tout
entier écoute. Moi, par dépit, je ferme mon téléviseur...
Le
lendemain, le cœur en marmelade, je m'interrogeais sur le sens de la
vie sur terre quand, sur la rue Sainte-Catherine, qui croisai-je ?
Mon banquier italien en chair et en os. Ce bandit, plus pot de colle
qu'un agent d'assurances, se rappelait m'avoir prêté trois mille
dollars qu'il évaluait maintenant à trente mille, et se souvenait
surtout que je le l'avais pas encore remboursé. Homme accroché aux
menus détails comme une bigote à son scapulaire autonettoyant, il
me suggéra d'acquitter ma dette, faute de quoi je serais en danger
de mort.
Je
me souvenais vaguement de lui avoir dit d'aller renifler les culottes
de sa mama et d'avaler la queue de son chien homosexuel. Je lui
demandai s'il avait suivi mon sage conseil. Comme il détestait la
contrariété et qu'il avait la mémoire plus alerte que celle d'un
boxeur professionnel, l'air ambiant s'alourdissait. Son macaque et
garde du corps italien l'accompagnait, et le banquier, enhardi par la
présence à son flanc de son gorille, me flanqua une gifle. Pour
réplique, je lui en refilai une, encore plus fort. Il fit implora
des yeux son macaque qui aussitôt sortit son revolver, et tira trois
balles en ma direction. L'une d'elles me fut fatale. Je venais tout
juste de mourir.
Premier
acte après ma mort : l'embaumement. De toute ma vie, je vous jure
que je n'ai jamais été aussi beau : à côté de moi, George
Clooney aurait ressemblé à Lady Gaga. Je voulais féliciter le
personnel de la morgue pour ma morgue, mais le directeur des pompes
funèbres m'en dissuada, car m'a-t-il affirmé avec toute son
expérience de croque-morts : « Un mort doit faire le mort !
C'est la règle. Veuillez respecter la tradition, monsieur
Pique-Cerise, et fermez-là, je vous en prie ! De plus, je vous
conseille de ne pas sortir de votre cercueil pendant la messe funèbre
; les gens pourraient croire à une nouvelle résurrection et un
autre avant vous, assez connu ma foi, nous a déjà fait le coup ;
une religion est née, et plusieurs milliers de fanatiques plus tard,
on a eu les Croisades.
Deuxième
acte : la messe funèbre. Quand l'église fut remplie de senteux
venus constater ma mort, j'ai remarqué que les personnes des cinq
dernières rangées sont sorties de l'église quand l'attention
générale s'est dirigée vers la nef où le prêtre avait commencé
son spectacle. Ces personnes curieusement sont toutes revenues à
leur place vers la fin de la messe, après avoir pris un café au
resto du coin, pour bien faire voir aux membres de la famille qui
sortaient de l'église, qu'elles avaient bien assisté à la
cérémonie. Cette pratique édifiante, m'ont dit les autres morts,
est assez répandue.
Enfin,
troisième acte : le cimetière. J'ai eu froid dans le dos quand les
premières pelletées de terre furent lancées avec fracas contre mon
cercueil. J'avais la preuve que j'étais bien mort. Mes dernières
céréales me revenaient en mémoire : je revoyais ma première
blonde et sa morve dégoulinante ; ma théologienne plus belle qu'une
pute, sans être aussi salope que mémère Teresa ; la fille du
gendarme et l'épreuve du suppositoire ; ma belle petite Turque et
son frère qui lui collait au cul ; mon bas-bleu qui aurait raflé le
Goncourt si seulement elle avait entrouvert les jambes ; ma petite
Portugaise qui s'est enfuie avant que je ne lui tripote la tourte du
Lac Saint-Jean, et ma vieille vache folle, sentant l'encens et
l'odeur de vieux garçon du curé. Ma mémoire s'embrouille, mais
c'étaient de vraies vacheries. N'ai-je pas écrit que la pédophilie
est le passage obligé du séminariste vers la prêtrise, que les
jeunes filles filent pendant que les prêtres pédophilent. Avouez,
mes agneaux, que ce ne sont pas des choses qu'on raconte sur son lit
de mort quand le prêtre nous enduit de l'extrême pisse, ni après
le chapitre consacré aux histoires de fesses dans le Play-boy
italien, qui s'appelle aussi l'Osservatore
Romano ! J'avoue cependant que
j'ai fait preuve de retenue pour ne pas troubler la paix et les
bonnes mœurs dans les foyers catholiques. J'ai censuré mes céréales
les plus graves : j'ai déjà fait accroire à une religieuse,
complètement soûlée au vin de messe, en mettant ma queue dans sa
bouche, qu'elle avalait un ostensoir ; j'ai regardé avec
délectation le spectacle d'un cardinal respectable qui enculait un
enfant de chœur dans un confessionnal. Il y en a des plus
troublantes encore, mais, celles-là, je les réserve pour ma
rencontre avec Parminou.
En
attendant cette réunion, j'erre dans le Carré des morts où je
constate que si tous les morts ne sont pas des lumières, celle de
Jean Chrétien brille encore moins fort que les autres. Le Gardien de
l'attente lui a confié comme devoir, avant son audition personnelle
avec Parminou, d'écrire des phrases intelligentes. La barrière est
élevée, mais comme il est très doué, il a pondu un texte pour
avertir les parents de ne pas laisser leurs enfants jouer avec des
armes nucléaires dans leurs sous-sols. Il en a fait une autre où il
suggère aux Montréalais, qui prennent le métro, de ne pas jeter
leurs bungalows dans les poubelles. Enfin, il conseille aux passagers
des autobus de la métropole de ne pas transporter leur frigidaire
avec leur divan, aux heures de pointe. J'ignore s'il va s'en sortir,
mais il a des scandales des commandites et des balles de golf à
manger.
Dans
ce même carré, le Gardien a demandé à Pierre-Elliot Trudeau de
manger des hot-dogs en compagnie de Robert Bourassa, pendant que
Claude Ryan, qui sert de cuisinier, doit réciter les litanies
triomphantes de l'échec du fédéralisme canadien.
Et
moi, humble plume, maintenant invisible, je dois écouter les
conversations de mes amis sur leurs téléphones cellulaires. Robert
affirme : « Ce Céréale Pique-Cerise, quel téteux ! Quel mauvais
garçon ! Quel mécréant ! Que de céréales n'a-t-il pas fait
éclater ! Enfin, nous voilà débarrassés de sa présence ! Il
n'était pas trop tôt !
Pourtant,
je comptais ce Robert comme mon meilleur ami. Celui qui jamais ne
m'aurait trahi. J'ai pris un coup de mort ! et je me suis dit : «
Céréale, tu n'es plus que poussière ! Qu'est-ce que ça peut bien
foutre si tous les gens se crissent de toi ! »
Soudain,
comme pour me remonter le moral, j'entendis la voix rieuse et
souriante de la fine Céline : « Ce Céréale Pique-Cerise, quel
salaud ! Comme je le détestais ! Il faisait tout pour déplaire aux
femmes : il les détroussait, les retroussait, déchirait leurs
brassières tellement il était animal. J'ai gardé de lui un très
mauvais souvenir : il m'a violé dans l'église paroissiale avec le
curé comme aidant-naturel pendant que l'évêque, toutes culottes
baissées, dégustait comme un bonbon la queue d'un enfant de chœur
assis sur un banc et que le bedeau posait une affiche sur la porte de
l'église prévenant les dames mariées de recevoir la visite
paroissiale du curé seulement les jours où leurs maris seraient
absents. Puis elle ajouta, d'une voix sensuelle : Ce Céréale
Pique-Cerise, quel trou de cul ! »
Et
une grande force invisible m'aspira...
Denis
Rheault
Montréal,
mars 2015
Commentaires : si vous le désirez, vous pouvez me faire part de vos commentaires :
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Vous pouvez faire lire ce texte à tous vos amis.
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